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J'AI RETROUVÉ MA CRAIE. Je suis né dans la maison de campagne de mon grand- père; il en occupait le rez-de-chaussée et ma famille le premier étage. Là s'écoula mon enfance, entourée de celte auréole de soins providentiels dont nos meilleurs amis, c'est-à -dire nos parents, sont seuls capables. C'est dans cette sereine atmosphère, dans ce milieu de tendresse et de bonté que s'envola mon âge d'or. Mais si ce bonheur auquel chaque habitant de la maison paternelle prenait plaisir à contribuer fut grand pour moi, je ne saurais affirmer qu'il fut toujours réel pour ceux à qui j'en étais redevable ; mon enfance fut turbulente, étourdie, et je mis aussi souvent à l'épreuve la patience de mes parents que leur affection ; mille petits méfaits de ma part durent être supportés par eux, je me trouvais sans cesse placé entre une faute et un pardon. Trop certain de leur indulgence, il n'était pas de journée à laquelle je ne fusse obligé d'y avoir recours, et je me souviens en ce mo- ment d'une espièglerie assez marquée qui m'a valu, il y a une année, l'émouvante surprise d'en retrouver encore les traces aux lieux chéris qui furent mon berceau et le théâ- tre de mes plus innocents plaisirs. Je ne sais trop où ni comment je me trouvai un jour le possesseur d'un gros morceau de craie rouge ; mais si j'ai oublié la manière dont il tomba entre mes mains, je me souviens admirablement de l'usage que j'en fis aussitôt. Il m'inspira le goût le plus vif pour le dessin, tout en me donnant le moyen de m'y livrer, et me voilà barbouil-