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               L'ORIENT D'EUROPE AU FUSAIN.             133
contre les agressions de toutes sortes qui les menaçaient ;
ils s'armèrent et prirent le parti de faire les gendarmes
par les montagnes. La guerre finie, ces héros en disponi-
bilité avaient perdu toute habitude d'occupation, autre
que cette émouvante existence du klephte. Ils continuè-
rent à protéger les paysans et les moines ; mais, comme
il faut vivre, ils faisaient de temps à autre payer ran-
çon aux riches voyageurs. Et cela, quoi qu'en dise
M. About, sans cruauté et dans un but essentiellement
philanthropique, pour les frais du culte, si je puis m'ex-
primer ainsi. C'est une sorte de subvention forcée que les
gros propriétaires du pays payent tous les ans comme un
impôt, et que les étrangers subissent comme une douane.
   Beaucoup de ces percepteurs armés ne gardent rien
pour eux et donnent tout aux pauvres. Lingo, lui, qui
exerce en Morée, demande à chaque voyageur ce qu'il a
sur lui, et si le passant n'a pas vingt drachmes, il com-
plète la somme. C'est tout simplement, dans ce cas, une
application pratique du socialisme.
   Il est probable qu'insensiblement les vieux palicares
auraient été remplacés avec avantage par de vrais gen-
darmes ; mais on a eu la malencontreuse idée d'en déca-
piter quelques-uns et cela les a posés en martyrs; l'en-
thousiasme s'en est mêlé, ils ont pris des élèves.
   Malgré tout, l'institution est en décadence, et si on en
parle encore c'est pour flatter le pays et renforcer les
impressions des voyageurs.
   Voilà pourquoi nous avions derrière nous quatre
hommes eè un caporal.
   Et il n'y avait pas à dire, ces braves gens prenaient
leur rôle au sérieux à tel point que nous ne pouvions nous
arrêter pour cueillir une fleur, regarder le paysage, faire
 un calembour... ou autre chose sans avoir à deux pas
de nous notre escorte au port d'arme.