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CINQ MARS ET BE THOU. b9 « mon âge ; je crois que les loix m'en dispensent, au « moins je l'ay ouy dire. La mort ne me fait point de « peur; mais, Messieurs,—j'avoue ma faiblesse, — « j'ay de la peyne à digérer cette question. » . « Ils demandèrent chacun leur confesseur, sçavoir : M. de Cinq-Mars le Père Malavalette, Jésuite, et M. de Thou le Père Manbrun, aussi Jésuite. Celuy qui, jusqu'a- lors, avait eu la charge de les garder les remit, par l'ordre de M. le chancelier, entre les mains du sieur Thomé, prévôt des maréchaux de Lyonnois(l), puis prit congé d'eux, et ensuite tous leurs gardes, tous les larmes aux yeux. M. de Cinq-Mars les remercia et leur dit : « Mes amis, ne pleurez point ; ces larmes sont inutiles. « Priez Dieu pour moy et assurez-vous que la mort ne « me fit jamais peur. » — M. de Thou les baisa et em- brassa tous ; ils sortirent du Palais, les yeux baignés de larmes, se couvrant le visage de leurs manteaux ; après quoy, les condamnés allèrent embrasser M. Thomé, pré- vost général des mareschaux de Lyonnois, et luy firent compliment. « Le Père Malavalette venu, M. de Cinq-Mars l'alla embrasser et luy dit : « Mon Père, on me veut donner la « question; j'ay bien de peine à m'y résoudre. » —• Le Père le consola et fortifia son esprit autant qu'il put, dans ce fâcheux rencontre. Il se résolut enfin, et comme M. de Laubardemont et le greffier le vinrent prendre pour le mener dans la chambre de la gesne, il se rassura, et passant près de M. de Thou il iuy dit froidement : « Monsieur, nous sommes tous deux condamnés à mou- (1) Commandant la maréchaussée de celte province.