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MUSIQUE DRAMATIQUE. 493 unique, d'un sentiment unique, dans une mélodie également unique qui retentit avec accord sur dix, vingt, trente bouches à la fois ; il apparaît de temps à autre plutôt comme pour soulager les premiers chanteurs que comme un élément phi- losophiquement et musicalement distinct ; il prépare ou ren- force la manifestation de l'affection ou de la pensée que l'un ou l'autre des personnages importants est appelé à exprimer et pas autre chose. —Mais pourquoi le chœur, individualité collective, n'aurait-il pas comme le peuple, dont il est l'inter- prète naturel, une vie propre, indépendante et spontanée? Pourquoi ne constituerait-il pas par rapport au protagoniste, cet élément de contraste essentiel dans toute œuvre drama- tique, et par rapport à lui-même pourquoi ne refléterait-il pas plus souvent la variété multiple de sensations, de pen- sées, d'affections, de désirs qui frémissent ordinairement dans les multitudes? Est-ce qu'il est impossible au génie de s'élever de celte variété à l'unité qui jaillit constamment du conflit de tendances et de jugements divers? — Est-ce qu'en traduisant le consensus venu par degrés et par voie de per- suasion, il ne pourrait pas remonter à l'accord général, en réunissant d'abord deux voix, puis trois, puis quatre et ainsi de suite, dans une série d'intonations ascendantes, à l'aide d'un artifice semblable à celui dont Haydn se servit pour ex- primer, dans la Création, l'instant où la lumière jaillit sur toutes choses de la pupille de Dieu? Ou bien ne pourrait-il pas passer brusquement d'une voix unique aux voix collec- tives, c'est-à -dire d'un acteur au chœur toutes les fois que le consensus s'élève rapide comme l'éclair, d'une inspiration, d'un souvenir de gloire ou d'outrage passé ou présent? — Les modes d'expression populaire et de traduction musicale sont infinis, c'est au génie à les découvrir. Et que dirons-nous du récitatif? — Le récitatif qui joua judis un si grand rôle dans l'opéra, est maintenant très-né-