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444 CINQ JOURS A DRESDE. lage abrite au moins un orphéon ou une fanfare ; les fêtes musicales se multiplient et réunissent de nombreuses so- ciétés ; ce mouvement artistique qui se produit parmi les masses est un exemple de ce que peut chez nous l'initiative individuelle , lorsqu'elle est inspirée par une pensée pratique et élevée et qu'elle répond à un besoin véritable. Mais, au bout du compte, quel mobile a été employé pour ce progrès? L'amour propre, l'orgueil. Toujours ce mauvais sentiment avec lequel on nous conduit. On a organisé des concours où les sociétés les plus habiles devaient recevoir des médailles et, dans l'es- poir d'obtenir cette distinction, les orphéons se sont créés partout et sont accourus devant les jurys des concours. Puis les sociétés vaincues se sont désorganisées et souvent les victorieuses n'ont pu survivre à leurs succès. Ce serait presque le cas de faire un traité complet sur les fêtes musicales de France, mais malgré tout ce que j'aurais à dire à ce sujet, il faut savoir se borner et je m'ar- rête pour conclure. La musique, telle qu'elle est instituée parmi nous, est un véritable rocher de Sisyphe qui, s'écroulant sans cesse, doit toujours être remonté à nouveau au haut de la monta- gne. Les sociétés se créent vite et se désorganisent encore plus facilement. Et ce sera ainsi tant que l'art musical ne fera pas partie de l'éducation des enfants, et ce sera ainsi tant que l'on fera de la musique par envie, presque par mé- chanceté, tant que l'on fera de la musique les uns contre les autres et non les uns avec les autres. Ne craignons pas d'imiter servilement ceux qui ont réussi. Soyons musiciens par plaisir et non par orgueil, de même que les jeunes ïurners sont vertueux par amour du devoir. Considérons les concours comme un mal nécessaire qui fait surgir les associations artistiques de tous les points de notre pays, mais ne les regardons pas comme un résultat