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86 LES BEAUTÉS DE DANTE. cile compréhension une partie de la profonde admiration dont je suis pénétré pour le grand poète florentin; et si ja- mais je parviens à atteindre ce but, je prédis h M. Fraisse que l'horizon découvert par Dante lui apparaîtra d'autant plus vaste qu'il étudiera davantage et comprendra mieux son divin poème. Cela dit, j'entre en matière en commençant par déclarer que Dante est le génie le plus synthétique qui ait jamais existé. Lorsque Dante parut, l'art était relégué dans les ballades des troubadours provençaux, la langue italienne n'était pas encore constituée : aussi ful-il obligé de créer forme, lan- gue, puissance, par son propre génie, et il fit un poème dans lequel il résuma le ciel et la terre; il consacra dans ses vers toute l'ûme du moyen-age, il y déposa les germes de la con- ception de l'ère future, il fit d'un cantique un monument na- tional et religieux ; cinq siècles avant les premières ten- dances et les premiers développements d'une civilisation douteuse, il consigna dans ses livres, incarna dans sa vie les principes de la mission italienne en Europe, et de ses écrits on déduit à l'heure qu'il est les augures des destinées ita- liennes. La Divine Comédie est, si j'ose dire, la genèse universelle des lettres et des arts chrétiens, car elle contient tous les germes typiques de l'esthétique m iderne, et, en Italie, elle exerce une telle influence sur les lettres, que son empire sur la pensée italienne cl sa décadence dans l'opinion et les études, a toujours été effet cl pronostic de renaissance ou de déca- dence dans les beaux arts, la poésie et l'éloquence. (Comte C. Balbo). Le souverain mérite de Dante est d'avoir été le premier à recueillir les beautés potentielles contenues dans l'Evangile, et de les avoir incarnées dans une nouvelle langue, et par