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30 HIPPOLYTE D'ESTE. embûches des hérétiques. Pendant sa légation, il contint les uns par son autorité, il ramena les autres aux principes qu'ils avaient abandonnés, en leur laissant entrevoir quel- que espérance d'accommodement. Combien de choses, pour le salut de ce royaume, il sut taire et souffrir; combien de mesures il sut prendre, tantôt en public et aux yeux de tous, tantôt en secret et avec une certaine dissimulation. Il ne s'arrêta que lorsqu'il eut chassé les hérétiques de la Cour, ramené ceux qui étaient encore restés fidèles à leur Roi et à leur Dieu, et déclaré une guerre ouverte a ceux qui persis- tèrent dans leur obstination. De même que dans une graine est contenu le germe des arbres les plus grands, de même cette légation fut le germe et le principe de tant de grandes et fortes choses, plus tard heureusement accomplies en France , dans l'intérêt de la religion. Mais ce qui mérite par-dessus tout notre admiration, c'est que le Légat, ayant rencontré parmi les hommes les plus consommés en pru- dence et en sagesse des opinions aussi éloignées de la sienne •que le ciel est éloigné de la terre, il n'en resta pas moins fermement attaché a ses plans , et que, seul de son senti- ment, il sut conduire les choses a un tel résultat que l'évé- nement vint lui donner raison contre tous, et prouver qu'à lui tout seul il avait été plus clairvoyant et plus sage que tous les autres. En attendant, la critique ne l'avait pas épar- gné: les sourdes insinuations, les attaques déclarées de l'en- vie, tantôt lui reprochèrent sa patience et ses lenteurs, tan- tôt interprétèrent a mal ses plus sages mesures dictées par le courage et la prudence. Il sut dédaigner ces critiques, sans perdre de vue ses desseins; la suite des événements a tellement fait justice de ces imputations malveillantes, que l'on put a bon droit lui appliquer ces vers du poète (Ennius) : « A lui seul, par de sages lenteurs, il remit a flot le vais- seau de l'Etat ; de vains murmures ne lui firent jamais exposer