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UNE NOCE. 411 avait beaucoup de rois ei de princesses ; aussi avez-vous pro- digué à la galerie de leurs porlrails l'ocre jaune qui figurait l'or de leurs couronnes et avec lequel je nuançais nies giro- flées ; vous avez abusé, pour leurs manteaux de pourpre, du carmin que je réservais à mes roses, à mes dalhias ou à la robe chatoyante des perroquets que je perchais sur quelque cocotier dans l'île de Robinson. Vous voyez que j'ai tout con- servé précieusement. — Oui, bien précieusement et j'aime à retrouver tout le passé vivant, non seulement ici, mais dans votre souvenir. Rien n'a changé dans ce pavillon. En y entraut, il m'a semblé rajeunir de quinze ans, tant j'y ai vite reconnu tous ces objets amis. — II n'y manque qu'elles, Frédéric, dit-Louise d'une voix altérée, mais bientôt dominant son émotion elle reprit: J'ai éprouvé il y a huit jours une bien douce joie eti vous enten- dant me rappeler votre enjÇance: je craignais vivement de voir ce temps effacé de voire mémoire. — Ce qui me rend heureux surtout, chère Louise, dit Fré- déric, c'est de songer que ce riant passé aura un bel avenir el que nos cœurs longtemps habitués à s'aimer n'auront pas be- soin d'apprendre à se connaître, comme lu me le disais mé- chamment l'autre soir. — Peut-être avais-je raison cependant, dit tristement Louise dont les traits s'assombrirent. — Ne le répète pas, répondit-il ; si tu peux douter de moi, il est impossible que tu doutes de loi-méme ; il suffit de te voir pour comprendre toute l'élévation de ton âme, toute la supériorité de (on esprit. — Ah ! Frédéric ! qu'elle exagération et quels grands mots pour arriver à vanter une villageoise. — Une villageoise, ma Louise ! c'est de ta part une char- mante prétention, la seule que ta grâce te laisse. Tu es vil- lageoiseau même titre, toutes proportions gardées, que Marie-