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UNE NOCE. 233 je vous aurai toujours de la reconnaissance, je prends ce que vous voulez bien me donner ; je vous remercie beaucoup, non pas tant à cause de la conséquence du cadeau, que pour le plaisir que vous nous faites en voulant bien penser à nous. — Ne parlons pas de cela, répondit Frédéric un peu hon- teux de ces remercîments qu'il savait ne pas mériter, et sa- chons comment faire pour ne pas priver ces jeunes filles du plaisir de la danse. —Eh ! mon bon Monsieur, pourquoi sont-elles si difficiles ? s'écria fa bonne vieille. De mon temps, nous dansions aux chansons, et nous étions toutes plus légères que la plus lé- gère de maintenant. Mais il leur faut des musiciens et tant de choses que le bon Dieu ne saurait y suffire. Aussi, qu'ar- rive-t-il? elles n'ont jamais tout ce qu'elles veulent et font à chaque instant des péchés d'impatience. Nous autres, nous étions beaucoup plus raisonnables ; nous passions bravement toute la nuit au bal pour les noces et les fêtes, mais nous nous arrêtions de temps en temps, et, tout en nous reposant, nous chantions pour faire danser ceux qui nous avaient fait danser. Et voilà comme c'était au bon temps, mes enfants. — Tout va donc bien mal maintenant, mère Clairay, dit Louise qui entrait, et qui vint poser sa main sur la main ri- dée de la vieille femme ? — Ah! si toutes vous ressemblaient, tout irait mieux , répondit cette dernière en hochant la tête. Une rumeur confuse couvrit la voix de la vieille mère. A la vue de Louise, toutes les jeunes filles s'étaient rappro- chées, et chacune voulait lui apprendre à sa manière les mésaventures survenues. Enfin Louise dit : — Je sais tout. Jean-Marie, et vous Antoine Richay et Courtiaux, ôtez, s'il vous plaît,le petit orchestre de bois. Quoi- que nous n'ayons pas de musiciens, je vous promets que nous danserons, et pas aux chansons. S. BLANDY. (La suite au prochain n°).