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96 NICOLAS BERGASSE. pitoyable polémiste. Sa réputation de sagesse chez un peuple aussi positif que les Anglais nous est un sûr garant qu'il n'arrive pas les mains vides. Il a sans nul doute une grande charte, une loi de bonheur et de liberté à nous présenter... » J'insiste sur ce dernier mot, Messieurs, qui était au fond toute la pensée de Bergasse. Pas plus qu'il n'avait voulu en 91 de l'octroi de l'assemblée, il ne voulait en 1814 de l'octroi de la royauté. Suivant lui, la charte devait être pro- posée par le roi et consentie par la nation, qui lui aurait donné, sans se faire prier, les millions de voix dont elle sera toujours prodigue dans les moments d'enthousiasme ou de péril. Puis venait, comme péroraison à grand effet, le ta- bleau de la prochaine rentrée du roi dans sa capitale, les transports du peuple en voyant passer la fille de Louis XVI qui détournait ses yeux pleins de larmes de la place de la Révolution, le groupe héroïque des Condés où manque un jeune guerrier tué par trahison, le ciel entr'ouvert laissant voir les victimes du Temple prosternées et reconnaissantes aux pieds de l'Eternel, et, au plus fort de ce délire d'atten- drissement et d'espérance, quelques courtisans du régime déchu osant se présenter devant le cortège avec leur morceau de papier, et disant au roi : Signez, ou vous ne régnerez pas ! Le tableau était vif, comme on voit, non dépourvu de vé- rités utiles et tout à fait dans le sentiment du jour. Parmi le grand nombre de réponses qui furent tentées au nom du sé- nat et qui prouvent le grand succès des Réflexions, l'écrit du sénateur Grégoire mérite seul d'être conservé à l'histoire. Loin de défendre le corps politique dont il fait partie, l'ex- conventionnel le sacrifie sans commisération à je ne sais quelle minorité de ses membres restés étrangers, assure-t-il, aux faveurs de la tyrannie, et qui n'auraient voulu ni la pro- clamation de l'hérédité impériale, ni la création d'une no-