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78                            INAUGURATION.
dans la gravure, sont disposées de même, à gauche, l'ancre de l'espérance
et de la foi ; derrière, une M et une A entrelacées ; à droite, la colombe
apportant le rameau de l'éternelle paix.
   Pour interprète habile et fidèle de sa pensée, M. Chenavard a eu
M. Guillaume Bonnet. C'est ce dernier qui a sculpté le monument et mo-
delé avec une finesse, qui n'exclut ni la fermeté ni l'ampleur, le profil tout
militaire du peintre.
   L'inauguration a été majestueuse sans éclat. Le 21 juin, deuxième anni-
versaire de ce grand deuil, après une messe basse et l'absoute dites à
Saint-Just, le clergé a gravi la montée du cimetière en chantant les prières
des morts. Les artistes, les amis, les élèves du défunt composaient seuls le
cortège. Nous ne nommons personne, car presque tous y étaient. Un peloton
d'infanterie formait l'escorte.
   Le corps attendait à la porte de l'ancien cimetière. On l'a transporté de
là à sa demeure définitive. M. Martin-Daussigny a redit tout ce que Bonne-
fond avait fait pour mériter à jamais le souvenir de sa patrie, et un élève
de l'Ecole des Beaux-Arts a prononcé le dernier adieu de la reconnaissance.
Puis des mains pieuses ont jeté des immortelles sur cette tombe qui ne se
rouvrira pas prématurément, nous en avons l'espoir. Des femmes en deuil
qui avaient suivi le cortège, se sont associées à ce touchant hommage.
   Il a fallu longtemps pour descendre la lourde châsse de plomb à travers
l'étroit orifice du caveau. Le silence profond que l'assemblée gardait reli-
gieusement pendant cette opération lugubre n'a été troublé que par le
chant d'un pauvre oiseau des cimetières, dont je ne sais pas le nom, et qui
était venu se percher sur le saule-pleureur d'une tombe voisine. Il n'avait
que deux notes dans sa voix : l'une rauque, stridente, aigrelette ; l'autre
vive et aiguë comme un cri de bonheur et d'espoir. Il modulait ainsi à
perdre haleine , répétant sans cesse les mêmes cadences monotones et
sonores.
   Jamais je n'avais entendu d'oraison funèbre aussi éloquente.
   Amédée Bonnet, le dernier chirurgien illustre que notre corps médical
ait perdu, avait déjà, au lieu de son repos, à Loyasse, un tombeau en
pierre, orné par les soins de sa veuve et de ses enfants, et surmonté de son
buste en bronze, d'une ressemblance malheureusement problématique. Il
aura désormais une statue d'honneur, dressée dans la cour Saint-Martin du
grand Hôtel-Dieu, près de cette Ecole de Médecine et de ces lits de douleur
qui recueillaient chaque jour le fruit de ses ardentes investigations. Les
malades veilleront autour de lui en mémoire de ce qu'il a tant veillé au-
près d'eux.
  Le 2 juillet, le monument a été découvert en présence d'une assemblée