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                MATTHIEU GUIGNARD,                  171

Tous les plaisirs vous les pouvez goûter,
D'autres encor, sans borne, sans mesure,
Si toutefois cela peut vous tenter.
— Si... dit Guignard, Monsieur, ne vous déplaise,
Innocemment je vous ouvre mon cœur,
Pour en avoir je me mettrais voleur,
Et j'en prendrais... fussent-ils dans la braise.
— C'est bien penser. Cela vous fait honneur,
Reprit le diable, et l'on pourra s'entendre
Si mon moyen ne vous fait pas trop peur.
Avant de rien cependant entreprendre,
Tenez-vous bien à votre âme ? — Euh ! pas trop.
— C'est un hochet, un rien, une formule :
A cette chose absurde et ridicule
De tant tenir qu'on dit l'homme est bien sot,
On ne la voit, et, partant, elle est nulle.


Ce rien sans nom, ce rebut, ce débris,
Je vous l'achète, et j'y mets un beau prix.


De grand papier regardez cette rame
Toute à noircir de billets au porteur;
Ma charge à moi sera d'y faire honneur ;
Mais, en échange, il me faut que votre âme
Soit mienne, et ce dès le moment précis
Où vous aurez tous ces feuillets norcis,
Et moi payé la somme aux termes dits.
C'est un marché d'or que je vous propose :
Ne craignez pas d'abuser de la chose ;
Tout ce que peut valoir tout ce papier
Est déposé déjà chez mon banquier.


Matthieu Guignard, jeune homme tout physique,
Prend vivement la rame satanique ;