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TRAITRE OU HÉROS ? 63 ce brave (1)? répondit le bandit ; le premier il m'avait donné la sienne et n'y avait pas manqué. » Le colonel pleurait d'admiration. Ce dialogue est textuellement traduit d'un rapport que cet officier supérieur adressa lui-môme au roi pour lui signaler la conduite du chevau-léger Salvador Uiloa, et dont j'ai pu lire la copie dans un volumineux recueil des pièces de cette dramatique affaire. Les personnages qui y figurent ne sont point, il est vrai, de ceux dont s'inquiète l'histoire ; mais il faut reconnaître, on en conviendra, qu'elle prend soin d'enregistrer des scènes où éclate une moins véritable grandeur. Ce j'avais sa parole ne me semble nullement au-dessous d'une foule de mots ad- mirés, à moins juste titre peut-être, et je ne sais si beau- coup de héros historiques soutiendraient bien avantageuse- ment la comparaison avec ce pauvre bandit esclave de sa parole au point de préférer une mort certaine, et la mort ignominieuse du gibet, à la pensée de perdre l'estime d'un ennemi dans lequel il admirait un brave. Ephisio Malipierri fut condamné à mort. Le gouverne- ment ne crut pas devoir faire fléchir les droits de la justice en cette circonstance, et le coupable fut exécuté. Salvador Ulloa reçut la médaille qui lui avait été pro- mise et les félicitations du Souverain. Il renonça à la part que lui attribuait le Prégone royal dans la succession du supplicié et employa la prime de 2,000 écus qui lui fut comptée, en fondations de messes et en distributions d'aumônes pour le repos de l'âme d'Ephisio. Maintenant je reprends le titre de mon récit ; TRAITRE OU HÉROS? Lequel des deux fut le chevau-léger Salvador Ulloa ? (1) Plus textuellement : « ce vaillant homme, Valentuomo, » c'est l'ex- pression du rapport officiel.