Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
436                 BIOGRAPHIE DE LA MURE.

en arrière du progrès ; elle ne s'aventurait pas à suivre, même
de loin, les traces de ces beaux diseurs qu'elle tenait pour
inimitables et les érudits restaient toujours ensevelis dans la
poussière des écoles. La plupart, remplis d'un superbe dédain
pour leur langue maternelle, ne composaient qu'en latin. Lors-
qu'ils écrivaient en français, c'était par condescendance et pour
se mettre à la portée du vulgaire ; leurs lecteurs n'étant pas
difficiles, la forme ne les touchait guère. »
   « Que m'importe, écrivait un des plus illustres savants du XVlfte
siècle, l'abbé Lebeuf, que m'importe que l'auteur écrive bien ou
mal, en latin ou en français ; que je l'entende, cela me sulfit. »
   Telle était l'opinion répandue, surtout parmi les érudits du
XVIIe siècle, et La Mure ne chercha pas plus qu'un autre à s'en
affranchir. A plusieurs reprises, il semble être allé au devant de
la critique; il -s'excuse, dans ses préfaces, « ds la simplicité du
style historique dont il use, » il convient qu'il ne s'attache pas
dans ses écrits à la pompe d'un style flatteur, et cela de propos
délibéré, parce que, à son avis, « les fleurs d'éloquence n'y sont
pas convenables, » il les néglige et s'applique simplement « à la
vérité et simplicité très-pure et très-nue que demande l'histoire.»
   Les Du Chesne, les Baluze, les Guichenon, les Menestrier, se
montrent également insouciants du style. Ces savants historiens
s'inquiétaient fort peu de plaire, l'essentiel pour eux c'était
d'instruire. A leurs yeux, le fond devait l'emporter sur la forme.
En lisant La Mure, il faut donc lui pardonner d'avoir trop cédé
 au déplorable laisser-aller, au mauvais goût des historiographes
de son temps. Son style est suranné même pour l'époque où il
 vivait, mais ce qui n'a point vieilli c'est le fond de son Å“uvre.
 Par l'ensemble, la profondeur et l'étendue de ses travaux, par
la véritable création de l'histoire du Forez, l'humble chanoine
de Montbrison nous semble même digne d'occuper un rang dis-
tingué parmi les bons historiens provinciaux de la France et nous
avons le ferme espoir que la publication de son Å“uvre capitale,
l'Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez , lui assu-
rera désormais^ cette place.
                                                     R. C.