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                ÉLOGE DE M. DE CHANTELAUZE.                381

    Cependant la dure captivité qui a étreint ses plus belles
années, a été épargnée à ma vie, mais mon âme a subi la
plus amère de ses épreuves.
    Et moi aussi, j'ai vu tomber des institutions que j'avais
aimées avec foi et confiance ; j'ai vu crouler un trône que
j'avais défendu ; et moi aussi j'ai vu le roi que j'avais servi
mourir dans l'exil.
    Séparés par les orages, jamais divisés par le cœur, nous
nous sommes retrouvés au sein des plus chères sympathies,
dans l'asile des lettres et le sanctuaire de la foi, ces deux
nobles rendez-vous de toutes les vies pleines et agitées. On
ne puise que la le courage de se souvenir, et la force
d'attendre.
    Et quand enfin il a cessé d'attendre la justice de Dieu,
c'est moi qui suis chargé de lui porter la vôtre. Votre mis-
sion a imprimé le dernier sceau à cette indissoluble solidarité
de nos destinées. 11 me semble que j'achève ma tâche. Après
l'honneur de le défendre, la Providence ma réservé la dou-
ceur de le louer.
    Cette mission est douce en effet ; il me semble qu'on de-
vient meilleur en le louant et que l'âme se rafraîchit et s'é-
lève en respirant le parfum de ses fermes et modestes
vertus.
    Cette noble figure, si calme, si haute, si désintéressée, si
 douce et si fidèle, peut servir d'enseignement a nos temps
 orageux où les ambitions sont si ardentes, et les grandeurs
 si fragiles, où les institutions passent comme les alliances,
 où les amitiés s'envolent si vite, où les promesses durent
 si peu, où les intérêts s'appellent des droits, les faiblesses
 des devoirs ; où la politique semble une énigme , la patrie
 un marche-pied, et la religion un manteau; où la force de-
 vient l'oracle du monde, et l'imprévu le dieu de l'histoire.
    Mais le cœur se serre en repassant les amertumes de