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484 ÉTUDES LITTÉRAIRES CONTEMPORAINES. sœur de sa mère était religieuse. Mme Récamier aimait beaucoup cette maison, et se plaisait à se rappeler le temps qu'elle y avait passé; on a trouvé dans ses papiers une descrip- tion du monastère ; Mme Lenormand a découvert de plus un passage dans lequel Mmo Récamier parle des regrets qu'elle éprouva en abandonnant cette calme retraite : « La veille du jour où ma tante devait venir me chercher, je fus conduite dans la chambre de Mme l'abbesse pour recevoir sa bénédiction. Le lendemain, baignée de larmes, je venais de franchir la porte que je me souvenais à peine d'avoir vu s'ouvrir pour me laisser entrer, je me trouvais dans une voiture avec ma tante et nous partîmes pour Paris. — Je quille à regret une époque si calme et si pure pour entrer dans celle des agita- tions; elle me revient quelquefois comme dans un vague et doux rêve, avec ses nuages d'encens, ses cérémonies infinies, ses processions dans ses jardins, ses chants et ses fleurs. » Des années vont s'écouler avant que Julie Bernard repa- raisse à Lyon : remarquée encore enfant pour sa beauté , elle fut mariée au printemps de la plus triste année de notre histoire, à Paris môme, — le 24 avril 1793, — avec Jacque- Rose Récamier, un des nombreux Lyonnais que recevait M. Bernard, car i! aimait spécialement voir chez lui ses compatriotes. M. Récamier, né en 1751, était le fils d'un riche négociant en chapellerie et occupait alors un rang considérable dans le monde passablement effrayé de la banque. Les jeunes époux demeurèrent à Paris, cherchant d'abord à se faire oublier, puis, quand les temps meilleurs revinrent, ils tinrent maison, et Mme Récamier se lia avec tout ce qu'il y avait de considérable dans la nouvelle société. « Sa beauté, nous dit sa biographe, avait achevé de s'épa- nouir. Une taille souple et élégante, des épaules, un cou de la plus admirable forme, une bouche petite et vermeille, des dents de perle, des bras charmants, quoique un peu