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458              LES MOUTONS ET LES LOUPS.
      Le malheureux londu reprend bientôt courage,
      Et son habit laineux redevient florissant ;
      Mais le loup de nouveau se remet à l'ouvrage,
      Aiguise ses ciseaux et retond l'innocent.


      Toujours le même jeu, toujours la même épreuve,
      Et, malgré la leçon, le mouton patient,
      Qui d'un chaud paletot sent son échine veuve,
      Reste du loup rusé le très-humble client.

      Il a la foi robuste : on lui promet des primes,
      Et jamais à l'appât il n'oppose un refus ;
      Mais hélas ! dans le fait, on le nourrit de frimes
      Tant et tant qu'à la fin sa toison ne croît plus.


      Et sera-l-il guéri de sa sotte espérance ?
      Non ; et il lui reste.encor sa peau, sa maigre peau,
      Et monseigneur le loup aura la complaisance
      De le débarrasser d'un ennuyeux fardeau.

      Notre pauvre écorché n'ose plus reparaître ;
      Mais nous avons un loup des plus accommodants,
      Et, pour lui faire honneur, ce magnanime maître
      Daignera le croquer d'un simple coup de dents.


      Moutons, écoutez bien et prêtez-moi créance :
      Méfiez-vous d'un loup au langage coquet,
      ( Le plus à redouter n'est pas celui qu'on pense )
      Et ne broutez jamais dans les prés du parquet.


      L'herbe, qui vous allèche, en sa tige recèle
      Un terrible poison, entraînement fatal,
      Besoin de chaque instant, qui trouble la cervelle,
      Et conduit le malade au lit d'un hôpital.

                                       Paul SAINT-OLIVE.