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l (CONSIDÉRATIONS SUR L,'JÉPOPË£. J7 grandes figures des patriarches et des prophètes, des juges et des rois, que dis-je? celle du Messie lui-même semblaient, m'apparaître tour à tour. Que si, détournant un instant mon esprit de l'histoire qui m'envahissait de toutes parts, je ne cherchais dans les livres saints que la beauté littéraire, alors aussi je goûtais un charme ineffable dans cette contemplation solitaire. En visitant, près de Bethléem le champ de Booz, je savourais les grâces naïves de l'inimitable idylle de Ruth et de Noémi. Dans les antiques jardins de Salomon, je relisais ce céleste chant d'amour tout oriental connu sous le nom de Cantique des Cantiques. Les bords du Jourdain me rappelaient l'élégie touchante que les Juifs captifs à Babylone soupiraient sur les rives étrangères de l'Euphrate, en regrettant le fleuve de la patrie. Sur la colline de Sion, je récitais les principales odes du roi-prophète, odes de victoires, odes de défaites, odes de douleur, odes d'allégresse, odes d'abattement, odes d'es- pérance, odes enfin qui, en s'élevant sans cesse vers Dieu, expriment tous les sentiments de l'âme et s'accordent avec tous les tons de la lyre. Dans la grotte de Jérémie, je re- disais ces lamentations sublimes dont la mélancolique tris- tesse égale les gémissements aux calamités qu'elle déplore. Au milieu des restes de tant de villes anéanties, ou qui ne sont plus que l'ombre d'elles-mêmes, je répétais aux échos la terrible prédiction des prophètes qui en avaient annoncé la destruction. Comme leur éloquence foudroyante subjuguait alors mon âme, et combien je la trouvais supérieure à celle des orateurs les plus vantés de tous les temps ! Si je voulais sonder les replis les plus cachés du cœur humain et me nourrir de morale et de philosophie, j'ouvrais le livre de la Sagesse, celui des Proverbes, l'Ecclésiaste et l'Ecclésiastique. Le livre de Job, en m'enseignant la résignation, étalait en même temps devant moi les images les plus poétiques, les 7