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358 DES PEINTURES QUI DÉCORENT
Europe les avaient jugés dignes de leur protection ; que les
artistes du premier ordre, loin de les dédaigner, avaient
consacré leurs veilles a ces travaux microscopiques : la
véritable grandeur d'une composition n'est pas en raison de
la surface qu'elle occupe ; de même que les camées antiques,
malgré l'exiguité des proportions, se recommandent aux mé-
ditations de l'artiste, les médailles aux études de l'historien,
de même aussi ces miniatures sont riches d'enseignements
pour l'art, pour l'histoire, pour l'archéologie.
On a dit souvent que les imagiers du Moyen-Age, loin de
rechercher la gloire, s'étaient appliqués, par humilité chré-
tienne, à rester inconnus, et que leurs noms étaient ainsi
voués à un éternel oubli. Quoi qu'il faille penser de cette
modestie, ce désir, s'ils l'ont eu, ne s'est pas réalisé; grâce
aux recherches d'infatigables érudits, nous possédons une
liste très-nombreuse de ces artistes si longtemps méconnus.
Peut-être sera-t-on surpris de trouver dans cette liste des
noms comme ceux de Pérugin, de Michel-Ange, de Raphaël,
de Léonard de Vincy : ces grands hommes n'ont pas cru
déroger en descendant à ces minutieux travaux.
Et parmi les protecteurs de cet art que le moindre de
nos fonctionnaires jugerait indigne de son attention, qui
s'attend a trouver les noms de Charlemagne, François Ier,
Charles-Quint?Comment supposer que Charles-le-Téméraire,
que plusieurs ducs de Bourgogne, qu'un grand nombre de
priucesses ont pu encourager, patroner' et même pratiquer
cet art de leurs nobles mains ?
L'ornementation des livres était jadis considérée non
comme une chose futile et sans portée, mais comme un
moyen puissant de donner du charme a l'étude, et digne par
conséquent de l'attention des hommes éclairés. Plus d'un
savant a dû peut-être sa vocation première à la fascination
qu'exerçaient sur lui ces peintures : Alfred-le-Grand ne savait