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                       EXPOSITION DE 1 8 5 8 .                   339
nouer leurs branches et masser leur feuillage, que pour assembler
 avec harmonie cinq hommes ayant des costumes variés et des
 poses diverses.
   C'est au choix des sites qu'il nous représente, c'est à la façon
 dont il rend les effets de perspective et dont il distribue la lu-
 mière, qu'on reconnaît le sentiment poétique d'un paysagiste.
 C'est surtout au fini des derniers plans qu'on découvre l'ha-
bileté de sa main, et c'est dans l'exécution des petits détails
 et dans la manière dont il anime ses tableaux, que son
 esprit se fait voir. C'est l'esprit, ou autrement le goût, qui
velouté délicatement les gazons, découpe les touffes d'herbes,
place ici plutôt que là une fleur, une branche morte, une tige
fîère et élancée.
   Dire qu'un bon paysagiste peint d'après nature, est une ex-
pression inexacte. Un artiste qui copierait rigoureusement la na-
ture serait incomplet et risquerait de faire du médiocre. Celui qui
en est fortement saisi la poétise, l'idéalise, l'embellit. Il corrige
ce qu'il y a de défectueux dans le site qu'il a choisi, et il sup-
plée par sa propre invention à ce qu'il y manque. Ici il déchire da-
vantage ces rochers et tourmente ces arbres ; là il éclaircit un coin
de forêt, avanceou recule une colline, accidente le cours d'un ruis-
seau. Il anime, il vivifie ce que la nature lui offre et lui imprime
un cachet qui est le sien. Il peint autant d'après ses souvenirs
que d'après les paysages qu'il a sous les yeux, et au besoin même
il prend une partie de celui-ci et une portion de celui-là pour
les fondre, en un tout harmonieux et saisissant.
   Il y a du talent et beaucoup dans la Vue prise à Damiette
après l'inondation du Nil, de M. Dauzats, dans la Bourse de
Hambourg détruite par l'inondation du 7 mai 1 882 de M. Mayer,
et dans la Vue de Venise de M. Van-Meer. Ces tableaux repré-
sentent des maisons, des monuments, une certaine architecture
enfin, et j'imagine qu'ils sont exacts. Ils doivent l'être ou c'est
une faute capitale. Malgré tout le mérite que leur reconnais, je
leur prélère telle autre petite toile, parce que l'artiste a dû y
mettre non seulement de son talent, mais de son imagination.
   L'imagination peut faire partie du bagage de M. Monticellij