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                                   ISA.PLËS.                             'S'2ù

nombreux ignorent cette circonstance intéressante. Et à Sor-
rente, que sa naissance immortalisa, le Tasse aujourd'hui n'est
presque plus connu que de l'étranger (1).
   On prêchait en ce moment une station ou retraite dans
cette même cathédrale. La foule était grande à l'église, le ser-
mon allait commencer. Quelque chose de singulier près de la
chaire attira mon attention. Je me glissai tout doucement de ce,
côté. C'était une poupée-femme de grandeur naturelle, vêtue
entièrement de noir, avec des bandelettes de mousseline blanche
sur la tète et autour du visage. On voulutbien m'expliquer qu'on
allait prêcher sur les douleurs de la Vierge, et que je voyais une
Mater dolorosa. La poupée, m'assura-t-on, ne reste pas impassible
pendant le discours ; d'adroits mécanismes la font remuer, s'a-
giter, peut-être même gémir aux moments opportuns. J'eus le
regret de ne pouvoir en juger.
   Nous voulions voir Amalfi en allant à Pœstum, et à Vietri, au
 sortir de la vallée de la Cava que Valéry appelle « une vallée
 suisse avec des oliviers et le soleil de Naples, » nous avons
 découvert le golfe de Salerne, si différend de celui de Naples,
quoique sous une latitude plus méridionale encore. Il est aussi
austère, aussi désolé, aussi orageux que l'autre est riant, vo-
luptueux et paisible. De Vietri à Amalfi, la route taillée dans
des montagnes de roches nues, côtoie la mer sans autre barrière
contre l'abîme qu'un léger parapet en maçonnerie. De loin en
loin, des ravins où s'est ramassée la terre végétale sillonnent et
coupent la montagne et les rocs, bordés de quelques bouquets
de verdure, et, traversant la route, descendent jusqu'à la mer.
Alors parfois une ou deux habitations adossées au chemin bai-


   (1) Gajassi, sculpteur romain, d'une intelligence et (l'un talent distin-
gués, me racontait qu'il avait dessiné le modèle d'un très-beau monument
pour le Tasse, à Sorrente. Il n'y a pas eu moyen de faire goûter son projet
aux Napolitains. Bien différent du Romain, l'habitant du golfe, amolli
par les délices des lieux qu'il habile, n'a pas le culte de la gloire ni des
grands hommes (je parle du peuple) ; son culte à lui c'est le soleil, la pa-
resse et le plaisir.