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72 LE PÈSE DE LA CHA1ZE. la chose même, il y avait plus de trente ans, et que l'Europe y était maintenant accoutumée, et les protestants hors de tonte raisonnable espérance là -dessus, depuis le refus du feu roi dans la plus pressante extrémité de ses affaires de rien écouter l à - dessus, il fallait au moins savoir profiter du calme, de la paix, de la tranquillité intérieure qui en était le fruit; et moins encore, de gaîté de cœur et dans un temps de Régence, se remharquer dans les malheurs certains et sans ressource, qui avaient mis la France sans dessus dessous, et qui, plusieurs fois, l'avaient pensé renverser depuis la mort de Henri II jusqu'à l'Édit de Nantes, et qui l'avaient toujours très-dangereusement troublée depuis cet Édit jusqu'à la fin des triomphes de Louis XIII, à La Rochelle et en Languedoc. » A tant et de si fortes raisons, le Régent n'en eut aucunes j opposer qui pussent les balancer en aucune sorte. La conversa- tion ne laissa pas de durer encore; mais depuis ce jour là , il ne fut plus question de songer à rappeler les Huguenots, ni de se départir de l'observation de ce que le feu roi avait statué à leur égard, autant que les contradictions et quelques impossibilités effec- tives de ces diverses ordonnances en rendirent l'exécution possible. Sous Louis XV, le sort des protestants fut plus rigoureux que sous Louis XIV. La tolérance civile était si peu encore dans les mœurs que les Philosophes du XVIII e siècle n'élevèrent jamais la voix en leur faveur, et si l'un d'eux prit en main la défense de Calas, ce fut bien plutôt au nom de l'humanité qu'au nom de la tolérance. « Il semble, dit M. de Noailles, que dans leurs cri- tiques sur l'état social, les Philosophes n'aient pas vu quelle place tenaient parmi les abus de leur temps, les lois relatives aux cal- vinistes (1). » « Malgré l'affaiblissement des idées religieuses, l'intolérance civile était toujours la maxime dominante (2). » C'est ainsi que Montesquieu lui-même, dans son Esprit des lois en venait à conclure que l'unité de religion est nécessaire à la sûreté et à la tranquillité de l'Etat. (1) Hist. de Mme de Maintenun, t. II, p. 627. (2) Hisl. de M">e de Maintenon, par M. de Noailles, t. II, p. 626.