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                         BIBLIOGRAPHIE.                       251
l'auteur ; ne rien faire ou voir s'égorger les gens n'a jamais
été dans nos sympathies.
        Et puisqu'il faut que la mort vienne
        Glacer nos fronts épanouis
        Que du moins elle nous surprenne
        Dans un dîner de gais amis.
   Ètes-vous bien sûr qu'il vaille mieux être surpris par ce ter-
rible moment, au milieu des inepties de trois ou quatre jeunes
fous qu'entouré de l'escorte sacrée de la famille et des amis ? En
fait de mort prompte il n'en est qu'une glorieuse, qu'une dési-
rable, celle des champs de bataille ; mais occasionnée par une
apoplexie foudroyante après un dîner trop copieux, c'est un
affreux malheur que nous ne pourrions chanter, même avec la
musique de M. Ward, tant belle fût elle.
   Après avoir, écolier naïf et inexpérimenté, rimé des choses
dont il ne connaissait ni la portée ni l'importance, notre au-
teur, hors de page, prit sa route dans un autre sens. Malheureu-
sement, comme à toute tête trop jeune, la pensée lui manquait
encore ; dans ce cœur trop neuf la sensibilité n'était pas venue ;
ses yeux n'avaient pas encore vu le beau et, ne pouvant voya-
ger seul, ne pouvant suivre les grands maîtres, il se prit à
marcher à la suite du guide le plus déplorable que notre lit-
térature moderne puisse offrir. Alfred de Musset lui apprit la
crânerie et bientôt notre jeune égaré se mit, le chapeau sur
l'oreille , à rimer des vers dans le genre de ceci :
J'ai toujours quant à moi beaucoup aimé les femmes ;
J'en demande pardon à nos dévotes âmes,
Car je n'ignore point quelle est leur charité ;
Non, je ne comprends pas qu'un homme puisse vivre
Pour bâiller à la lune ou maigrir sur un livre
Loin du sexe charmant qu'on nomme la Beauté.                *
Sans les femmes, la vie est un rosier sans rose,
Un bois où pour chanter nul oiseau ne se pose ;
C'est un repas sans vin, un cigare sans feu
Bon! disent nos lecteurs, d'où lui vient cette audace?
Y songe-t-il? venir nous lancer à la face
A nous, gens mariés, cet indiscret aveu !
   Il y en a comme cela plusieurs pages, et l'on ne sait vrai-
ment pour quelle raison l'auteur s'est arrêté. Avec la facilité
de passer d'une idée à une autre , de sautiller d'ici de là sans
savoir où l'on va, on peut s'agiter longtemps sans aller loin ,
écrire un volume sans conclure, c'est d'ailleurs assez le genre
et la manière du maître.
   Moi, je suis ainsi t'ait, dois-je donc me refaire ?
   Chacun est, après tout, gourmand à sa manière;