Revue du Lyonnais » série 2 - n°14 ( 1857 ) » pp.279

                       EXPOSITION J)E 1857,                   279
    M. Baudit abuse de belles facultés : la facilité de son pin-
ceau l'entraîne à trop faire, et nous retrouvons éparpillées dans
un trop grand nombre de petites toiles des qualités que nous
voudrions voir concentrées dans une œuvre sérieuse. Nous en
excepterons cependant les Dunes de l'Armorique, étude remar-
quable de vérité , et d'une fine exécution.
   M. Loubon se renferme trop exclusivement dans l'étude des
environs de sa ville natale, et dans une manière excentrique de
représenter les animaux, qu'il peint du reste avec un remarquable
talent. Ses Boucs en tête d'un troupeau de la Camargue exécutant
chacun un mouvement différent, sur le devant du tableau,
tandis que les autres plans , se perdent dans la poussière, ont
fourni dans le temps, à un caricaturiste célèbre, le sujet d'une
charge lithographique, auquel ils prêtaient du reste parfaite-
ment. Le col de la Gineste représente un autre troupeau de chè-
vres dans la montagne, qui a un grand aspect de vérité.
    M. Humbert est aussi un peintre d'animaux remarquable, ses
Chèvres sur la montagne, sauf la blanche qui fait tache, sont d'une
bonne exécution, et le paysage qui les encadr'e est de la plus
charmante couleur.
    Il y a peu de temps que l'on a exposé , après coup, deux ta-
bleaux de M. Courbet, le grand prêtre du réalisme, ce talent
matériel incontestable et excentrique , qui érige bravement en
principe que le beau c'est le laid. M. Courbet l'a au inoins cou-
rageusement mis en pratique, dans une sorte de paysage lugubre
éclairé par un ciel extraordinaire, que l'on avait d'abord mis à
côté d'un retour de foire où éclate dans toute sa splendeur cette
vérité désolante, brutale et repoussante dont il a toujours fait
ses délices. A supposer après cela que le paysage et les figures
 fussent acceptables, on ne peut nier que les chevaux ne soient
 en bois et littéralement impossibles ; les deux tableaux doivent
remonter du reste à une époque déjà ancienne, et nous ont tout
l'air d'une exhibition de marchand qui a compté sur une réputa-
 tion de l'auteur, acquise plus récemment par des œuvres plus
 châtiées et plus sérieuses.

         (La suite an prochain numéro).