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484 LETTRE grande nef, des transepts et du chœur, et ensuite de loger cette niasse énorme des bases des piliers , ainsi triplés , dans l'espace , relativement trop restreint , de l'axe d'une pile à l'autre : il faudrait aussi élargir les travées !... Vous n'ignorez pas d'ailleurs, Monsieur, que tout est logique dans l'admirable architecture de nos monuments religieux ; tout s'enchaîne , tout se lie : on ne saurait impunément introduire la moindre réforme dans cet étonnant équilibre de forces qui agissent en sens contraire , qui se contrebutent les unes par les autres; il suffirait d'une erreur de calcul dans une poussée ou dans une résistance pour le rompre à l'instant et entraîner la ruine de l'édifice. C'est à quoi l'on s'exposerait, si l'on voulait tenter , sans une reccnstruction ad hoc , l'essai de votre coupole portée sur des sections de voûte en cul de four ; reconstruction bien autrement importante que celle qui concerne simplement le relèvement de la voûte du chœur , puisqu'elle exigerait la réfection , dans d'autres conditions de solidité , de tous les arcs des transepts et de l'abside , et de tout le système butant à l'extérieur. Involontairement, Monsieur, on est effrayé des dépenses que nécessiterait la réalisation de tous vos projets d'embellissements pour la vieille basilique lyonnaise ; mais si on laisse un moment de côté la question financière pour n'envisager toutes ces transformations qu'au point de vue artistique , on n'ose , en vérité , songer aux conséquences désastreuses qui en résulte- raient pour l'histoire de notre architecture nationale. Sans doute , Monsieur, les restaurations monumentales sont trop complexes pour que l'on puisse toujours les exécuter dans un sens ou dans un autre , d'une manière absolue , mais néan- moins il est un principe posé parla raison et dont on ne doit pas s'écarter, c'est de n'altérer en rien , quel qu'il soit, le caractère particulier à chaque époque qui se révèle dans la construction d'un édifice. En suivant une marche contraire , on arriverait bientôt à rendre impossible la classification des styles, et l'étude des constructions anciennes ne serait plus, en réalité, qu'un chaos perpétue], ou , pour mieux dire , elle deviendrait impraticable.