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DE LA DÉCADENCE ROMAINE. 391
mes, eux-mêmes, se prêtaient à tant de transformations,
qu'avec des bettes, des mauves ou des concombres, on
pouvait composer le menu d'un excellent repas. Je passerai
succintement en revue les détails du luxe de table des
Romains de la décadence, et j'espère faire entrevoir com-
bien , malgré le progrès , nous avons encore a parcourir
d'espace avant d'atteindre le sommet de cet olympe , dont
les dieux matériels manifestaient leur grandeur par des
prodiges gastronomiques.
Les Romains avaient une habitude qui nous semble très-
incommode, et qui en effet l'était probablement, ils man-
geaient à demi-couchés sur des lits. Le luxe patronait cet
usage, qui ne se trouvait pas a la portée de tout le monde,
et le bon genre faisait passer sur l'incommodité. Si la mode
aujourd'hui adoptait cette manière de se placer a table, la
fashion trouverait mille bonnes raisons en sa faveur. Dans
le principe, les Romains s'asseyaient sur des sièges ; mais
après leurs conquêtes en Asie , ils rapportèrent dans leur
ville tout le luxe des nations étrangères, qui se vengèrent
ainsi d'avoir été vaincues. Luxuria incubuit, victumque
ulsciscitur orbem. —Juvén. vi, 293.
Ce fut au triomphe de Cn. Manlius , après ses victoires
en Asie — An. R. 567, — que l'on vit pour la première fois
des lits de salle à manger en bronze, de magnifiques tapis,
des tissus de toute sorte, des tables monopodes, des aba-
ques,— buffets sur lesquels on étalait la précieuse vaisselle
du maître, — enfin tout ce qui constitue le luxe des fes-
tins. C'est a cette époque que remonte la coutume d'intro-
duire, comme accessoire des repas, la danse, la musique
et d'autres divertissements. — Tit. Liv. xxxix. 6. — Plin.
xxxiv. 8.
La salle à manger, cœnaculum , le cénacle, était ordinai-
rement établie dans la partie la plus élevée de la maison,