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M. DE MIRECOURT. 315 « Pourquoi n'es-tu pas venu a nous, frère, s'écrie-t-il, « à nous qui t'aimions , à nous qui avions fait tous nos « efforts, hélas ! pour attirer l'attention sur toi ? » Ici la puérilité prend une teinte d'odieux parce qu'elle se trans- forme en réclame. M. de Mirecourt sanglotte, et, pour que nul n'en ignore, il encadre sa douleur d'une bordure noire. Je ne conteste pas la réalité de l'affliction, mais, je ne puis souffrir cette hâblerie larmoyante qui bat la caisse sur un cercueil et qui s'essuie les yeux avec une affiche» OUTRECUIDANCE ET FANFARONNADES. Les plus mauvais ouvrages ont leurs bonnes pages, et il n'est piètre écrivain qui ne rencontre de temps à autre un heureux filon. M. de Mirecourt a eu sa veine, et j'avoue que je me suis senti souventes fois la rate incroyablement dilatée par l'élément ultra-comique introduit dans les biographies par la personnalité ridicule du biographe. Je ne tiens pas mon rire lorsque je vois apparaître a fleur d'eau la face burlesque de cet Alcide Tousez littéraire. Rien de plus amusant que de suivre les gonflements successifs de cette vanité batracienne. Alphonse Karr a fait, en quelque endroit, l'histoire d'un petit homme furieux de ne pouvoir être pris au sérieux à cause de l'exiguité de sa taille. Le malheureux se fouille con- tinuellement la cervelle pour trouver le moyen de faire acte d'homme ordinaire. Il déploie pour prendre son chapeau une vigueur suffisante pour porter une poutre ; il fait des lettres de change pour ne pas les payer, et pour être , ô bonheur ! poursuivi par un huissier parlant à sa personne, comme a une personne naturelle. Il constate ainsi sa force d'homme, son existence d'homme et non pas de gamin. C'est aussi le cas de M. de Mirecourt. Il débute piano, piano : il souhaite que « son pinceau ne soit pas jugé trop malhabile » et que l'on trouve qu'il « manie bien la couleur.» Les deuxpremiè-