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M. DE MIRECOURT. 313
offices et qui « communie avec une piété d'ange » {Id. 91), ne
peut, à moins d'être idiote, avoir la conscience en repos lors-
qu'elle monte sur les planches. La religion catholique est in-
compatible avec le théâtre contemporain. La femme qui se
confesse le matin et qui joue le soir Suzanne d'Ange est
inconséquente avec elle-même. Que les comédiennes soient
d'honnêtes femmes , rien ne s'y oppose ; mais qu'elles soient
chrétiennes, je le nie, car leur premier devoir, si elles sont
sincères, est de quitter la scène. Je n'aime pas plus rencon-
trer a l'église, le matin, encapuchonnée et voilée , l'actrice
que j'ai vue la veille, jouant un rôle de coquine décolletée
et le parant de toutes les séductions de son talent, que je
n'aimerais à voir les burettes remplies de vin de Champagne
et les encensoirs de patchouli.
La biographie de Rose-Chéri contient une anecdote qui
peut être citée comme un exemple de la manière faussement
sentimentale de M. de Mirecourt. Il s'agit d'un coupon de
rente envoyé à Rose par un jeune duc , et rapporté au père
dudit par le père et la mère de Rose, les époux Gizos.
« Le vieux duc sonne ses gens et leur ordonne d'appeler
« son fils. Celui-ci ne tarda pas a paraître. — Voyez, Mon -
« sieur, voyez quelle honnête famille vous avez offensée, dit
« le vieillard, lui rendant le coupon de rente, et lui faisant
« voir le père et la mère de Rose, qui pleuraient encore ! »
{Id. 39).
Rapporter un coupon de rente adressé à leur fille, est un
trait qui honore les conjoints Cizos, mais le déluge de larmes
qu'ils versent conjointement en « restituant le pli séducteur»
(sic), me paraît un coup de pinceau final qui fait de cette
scène un petit tableau de genre digne de la Morale en ac-
tion.
M. de Mirecourt abonde en traits pareils de sensiblerie
ridicule et fausse. Parle-t-il de M. Méry ? « Il nous sera peut-