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434 CORRESPONDANCE INÉDITE très fort que quasi la bosse passoit la teste. Devenu adoles- cent, ce jeune prince entend un jour dans une partie de chasse parler de la beauté merveilleuse d'Ysobie, fille de l'empereur Gordien. Il en devient sur-le-champ éperdument épris. Mais le moyen, avec une aussi protubérante difformitéquelasienne, de faire partager sa flamme à la belle princesse? Servion saura bien aplanir cet obstacle ; il possède jusqu'au don des miracles, écoutez : Théseus réclama Dieu et noire Dame tel- lement que leur grâce s'espendit en luy et incontinent il de- vint beau et droit et tel qu'il n'y eust en sa compagnie nul plus bel jeune (homme) que luy. Ainsi heureusement trans- formé, Théseus part pour Constantinople emportant joyaux, or et argent à foison. Arrivé dans celte ville, il s'introduit tout d'abord à l'aide d'un stratagème, dans la chambre môme de la princesse; bref, après nombre de péripéties, assez spi- rituellement racontée par l'auteur, il obtient la main d'Ysobie en se faisant reconnaître pour fils de roi. Et parvint plus lard, ajoute Servion, à la seigneurie de Saxogne (Saxe) dont sont yssus les illustrissimes seigneurs de Savoye. Voila la base historique que Servion donne pour appui à l'origine saxone de la Maison de Savoie. Or s'il se rencontrait quelque mal- avisé qui ne veuille pas l'en croire sur parole, il lui jette à la face cet argument sans réplique : Et qui, dit-il, plus en vouldra enquérir , je ly réponds que tous sommes partis d'Adam et de Eve, nos premiers père et mère. Avec un tel ba- gage historique Servion n'en a pas moins l'honneur insigne de marcher en lête de tous les chroniqueurs, historiens et annalistes dont les œuvres se trouvent reproduites dans le grand ouvrage des Monumenta hist. Patr. Faut-il s'étonner que de semblables compositions aient élé classées par les bibliographes dans la catégorie des contes et des romans? Toutefois on aurait tort de confondre Servion avec maislre Cabaret, auleur de l'ancienne Chronique qui