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•272                    LE DOCTEUR JEAN FAUST.

   « Eh ! quoi ! paysan , lui dit Faust, est-ce à un honnête
homme de se déranger pour une charrette de foin? »
   Le paysan répliqua par des injures, et Faust le menaça
d'avaler son foin, sa charretle et ses deux chevaux , s'il ne lui
faisait pas place. Le paysan , croyant qu'il se moquait de lui,
lui proposa d'avaler pardessus le marché un assaisonnement
dont la pudeur de ma plume refuse d'écrire le nom, quoique
bien des licences soient tolérées dans un récit fantastique. Je
renvoie mes lecteurs, dont l'imagination ne saurait se mettre
toute seule sur la voie , à la page 150 de l'édition in-12
que je possède de l'Histoire lamentable du docteur Faust.
    A ces mots, le docteur accomplit sa menace, séance te-
nante, et enchanta si bien les yeux du paysan que ce dernier
crut voir la bouche de Faust s'aggrandir démesurément et
engloutir, comme une mince bouchée , le foin , la charrette
el les chevaux. Le malheureux épouvanté , craignant d'y
passer lui-même, s'enfuit à toutes jambes quérir le bourg-
mestre pour arrêter ce singulier voleur. Mais , à son retour,
il trouva intacts à la place où il les avait laissés , ses chevaux,
que l'étrange opération subie n'avait même pas dételés , sa
charrette el son foin. Il se remit donc en roule poursuivi par
les rires de Faust el de ses compagnons , et par les impré-
cations du magistrat furieux d'avoir été dérangé pour rien.

                                           Eugène   YEMENIZ.



       (La suilc, à nn prochain numéro).