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264 LU nocTEuu JEAN FAUST. saisie d'horreur ou enveloppée dans le maléfice, les rayons de la lune prirent une couleur fauve et sanglante. L'air, qui circulait à travers les arbres avec un doux murmure, cessa d'agiter les branches; les rossignols, surpris dans le feuillage par celte conjuration diabolique, n'osèrent plus se livrer en chanlant aux joies de leurs amours el se lurent. Un grand silence régna dans toute la forêt ; déjà , les esprits évoqués par Faust, attendant pour se montrer qu'il eût prononcé les imprécations nécessaires, s'assemblaient autour de lui sur les cercles tracés par sa main et s'agitaient avec un bruit sem- blable au bruit que les oiseaux nocturnes font avec leurs ailes dans l'obscurité. Faust eut peur, et il y avait de quoi ; il voulut fuir, mais il était trop lard ; des mains invisibles le relinrenlel le fixèrent au cenlre de la circonférence magique. II n'y avait pas moyen d'en resler là , el noire pauvre docteur vil bien qu'il fallait achever la conjuration destinée à mettre le démon à ses ordres, sous peine d'ôlre lui-même victime de son audace. Il poursuivit donc el, plus mort que vif, somma le diable d'ap- paraître. Le diable obéit, riant sans doute de la frayeur de ce poltron de sorcier. Alors une musique, lointaine d'abord, el aussi agréable que peut l'être une musique exécutée par les puissances infernales, s'éleva de loules parts dans les bois. Elle se rappro- chait insensiblement, devint de plus en plus forle et de moins en moins agréable, et finit par dégénérer en un fracas épouvantable mêlé de tonnerres, d'éclairs, de cris et de raffales capables Je déraciner tous les arbres d'alenlour. Enfin, le démon apparut sous la forme d'un dragon de feu qui semblait vouloir se ruer sur Je malheureux Faust el s'insurger contre le pouvoir magique en vertu duquel le sorcier pusil- lanime était pour le moment plus fort que lui. « Que me veux-tu? — » dit le féroce dragon. Faust, quoiqu'il eût sans doule préparé son thème d'avance, n'était plus à même de