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166 ANTOINE BERJON. comme dessinateur à une maison de commerce qui avait pour spécialité la fabrication des broderies. C'était, suivant toute appa- rencej celle de M. Bony, homme distingué à la fois comme artiste et comme fabricant, et dont la galerie des Peintres lyonnais pos- sède trois tableaux defleursd'un véritable mérite. Mais il lui fallut, peu de temps après, renoncer à cette position , qui l'obligeait à des travaux d'arrangement et de composition pour lesquels il avait toujours eu peu de goût. D'un autre côté, son naturel peu sociable, qui avait encore été aigri par les rudes épreuves qu'il avait traversées à Paris, le fendait incapable de vivre avec per- sonne, et il abandonna sa place de dessinateur chez M. Bony pour celle de professeur à l'Ecole des Beaux-Arts qui lui offrait, avec d'autres avantages, celui de le mettre plus en évidence. Il y fut nommé, pour la classe de fleurs, au mois de novembre 181d, en remplacement de M. Barabant, peintre de fleurs et d'histoire naturelle, qui était mort en 1810. Le grand talent de Bcrjon le rendait éminemment propre à ses nouvelles fonctions, et il se fit bientôt remarquer à Lyon dans son professorat, comme il s'était fait distinguer à Paris par ses tableaux. Si son enseignement, empreint d'une véritable originalité, avait de prime-abord l'inconvénient de n'être pas toujours clair et facile à saisir par d'aussi jeunes élèves, il pos- sédait aussi un avantage immense, celui d'être essentiellement démonstratif pour ceux qui étaient assez forts ou assez intelli- gents pour le comprendre , et puis s'il rudoyait ceux auxquels il avait reconnu de véritables dispositions pour les arts, et s'il se montrait exigeant pour leur travail, il avertissait aussi consciencieusement de leur inaptitude ceux qui avaient pris quelques aspirations irréfléchies pour une vocation sincère, et plus d'un lui doit peut-être de n'avoir pas poursuivi étourdiment une carrière à laquelle il était impropre, et qui ne lui aurait offert que déceptions et qu'amertumes. Malgré ses éminentes qualités et l'excellence de ses leçons, il fut remplacé en 1823 par M. Thier- riat, qui était encore professeur il y a peu de temps. Ses opinions politiques et surtout la brusquerie de son caractère avaient déplu aux magistrats placés à la tête de l'administration lyonnaise de