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94 EXPOSITION UNIVERSELLE de notre ville, et je ne doute pas que la Revue ne leur consacre quelque jour une appréciation détaillée et tout à fait digne d'une œuvre de si haut mérite. Ces différents' travaux, de môme que ceux qu'il a entrepris à l'église Saint-Germain-des-Prés, n'ont pas empêché M. Hippolyte Flandrin d'envoyer à l'exposition une suite de magnifiques portraits traités avec cette science remar- quable et cette supériorité de dessin qui distinguent les peintres sortis de l'école de M. Ingres. J'en dirai autant d'une très- belle composition religieuse qui remonte à plusieurs années et qui représente Saint Clair êvêque de Nantes guérissant les aveugles, c'est là un très-remarquable tableau où l'on retrouve toutes les belles qualités d'ordonnance, et de grand style qui ont fait de M. Hippolyte Flandrin l'un de nos premiers peintres d'histoire. Son frère, M. Paul Flandrin, a exposé un assez grand nombre de ses beaux paysages historiques où l'expression d'une nature choi- sie se joint comme vous savez à un sentiment tout à fait antique et virgilien, qui rappelle avec bonheur quelques-unes des plus belles inspirations du Poussin. 11 ne m'est pas possible de citer l'une après l'autre toutes les toiles de M. Henri Lehmann ; je désignerai Tobie et Sarah, sujet biblique, traité dans un style très-noble qui traduit avec autant d'exactitude que de charme un fait emprunté aux annales de l'histoire du peuple de Dieu. Dans un sentiment tout différent j'ai remarqué les Océanides, sujet emprunté au Promèthèe d'Eschyle et qui est rendu avec un sentiment très-fin et très-élevé de la poé- sie des temps héroïques de la Grèce. M. Rodolphe Lehmann, élève de son frère M. Henri Lehmann, s'est inspiré à une source plus moderne ; dans son charmant tableau, il a pris pour sujet un épi- sode du roman de Graziella de M. de Lamartine , et cette com- position où il a su reproduire tout ce que les pages du grand poète renferment de touchant et de distingué lui ont valu, comme vous savez, une lettre qui renferme un éloge après lequel toute louange devient inutile et superflue. M. Rodolphe Lehmann a exposé en outre plusieurs autres toiles moins importantes que lui a sans doute inspirées le séjour de l'Italie et la vue de cette magnifique campagne de Rome qui sera pendant longtemps encore une source vive de belles créations pour tous les peintres. L'exposition de M. Decamps qui dépasse le chiffre de cin- quante tableaux ou dessins offre l'ensemble aussi prodigieux que complet de toute son existence d'artiste ; vous connaissez de réputation tout au moins ses scènes d'Orient, bazars, halte de cavaliers, cafés turcs, auxquels il a restitué toute la vérité d'une nature étudiée sur les lieux mêmes et prise littéralement sur le fait. On a dit de lui et de feu Marilhat qu'ils avaient été en pein- ture les Christophe Colomb de l'Orient; malgré son ambitieuse apparence, le mot est aussi juste qu'il est profond. A travers tant de perles rares et précieuses qui composent cet écrin éblouissant, je ne vous citerai que la Ronde de Smyrnc, la Ba-