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224 UN DÉJEUNER. Lisbeth. Non. Hermann. A votre père ? Lisbeth. J'ai écrit à mon grand père. Le roi a bien aussi sa volonté, à ce qu'on dit ; mais, mon grand père ! je me le rappelle. 11 fallait voir !.... J'avais sept ans, quand il vint nous faire visite avant cette campagne où il a été envoyé en Russie, et où il est resté si longtemps. 11 était si bon ! si bon! 11 me faisait sauter sur ses genoux ; je le faisais chanter, danser, conter des histoires ; j'en faisais ce que je voulais. Mais , quand mon père lui parlait, c'était avec une soumission et un res- pect ! Et quand mon grand père lui adressait la parole, c'était avec une sévérité ! et il me disait : « Vois-tu, j'ai toujours élevé to"n père à la hussarde. » — Mais vous êtes trop mé- chant, grand père, lui disais-je. Alors, il m'embrassait en me disant : Ah ! toi, petit démon, tu es bien heureuse de n'être qu'une fille. Hermann. Eh bien? Lisbeth. Vous ne comprenez pas? On croyait qu'il avait péri, le grand père. A la paix, on a reçu de ses nouvelles, et il vient d'être compris dans le dernier échange des prisonniers. Il a été longtemps malade ; enfin, il est arrivé a Berlin, et, comme il a beaucoup souffert, le roi lui a donné une place aux Inva- lides. C'est aujourd'hui qu'il doit venir nous voir pour la première fois, après une si longue absence. Bon grand père, comme j'aurai du bonheur a l'embrasser, a le caresser, a lui faire oublier ses peines! 11 sera enchanté de me voir si grande, et, pour que mon père ne le prévienne pas contre vous, je lui ai écrit. Je lui ai dit que vous vouliez m'épouser, que mon père ne disait pas non, mais qu'il y mettait des conditions