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126 DES LETTRES deux siècles ; c'est à ces sources que chacun doit puiser pour lever des doutes ou faire des découvertes. Le critérium dans les questions litigieuses, comme le principe de nouveaux progrès, reste donc étranger a tout empire d'autorité ; il re- pose uniquement sur le travail et sur le jugement per- sonnels. Ceux qui suivent chaque jour le mouvement de la presse scientifique peuvent seuls comprendre à quel degré cette direction dans le travail surexcite le sentiment d'eux-mêmes chez ceux qui à un degré quelconque prennent part au mou- vement. A chaque page vous voyez des auteurs réclamer leur droit de priorité, exalter leurs découvertes qui semblent a leurs yeux avoir été vainement attendues depuis que l'homme est sur la terre. A propos du fait le plus secondaire, on les entend répéter : Mes expériences, mes observations, mes doctrines. Non loin d'eux, le public, écho fidèle des pré- tentions de ceux qui le dirigent, ne cesse de proclamer les progrès de l'époque présente et de jeter un regard de dé- dain sur les hommes et sur les choses des temps qui nous ont précédés. Les lettres, hâtons-nous de le dire, sont loin d'avoir les mêmes enseignements. Elles inspirent le respect pour la sagesse et l'expérience des vieillards ; ce respect auquel se mesurent dans une nation la dignité des mœurs et la puis- sance des principes tutélaires ; ce respect sur lequel nous avons entendu naguère de si nobles et de si éloquentes pa- roles , et qui s'altère sans doute par toutes les causes qui affaiblissent les traditions littéraires? Ces traditions condui- sent , en effet, au respect de l'autorité. Les chefs-d'œuvre de la poésie et de l'histoire n'appar- tiennent point à notre temps. Nous ne pouvons les contem- pler qu'en portant nos regards en arrière et en remontant le cours des âges ; première influence exercée sur notre