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 280                ÉTUDE SUR BLAISE PASCAL.
  du Jansénisme ne parait qu'une querelle de moines qui, grâce
  à d'heureux hasards, a fait quelque bruit dans le monde. Exa-
• minée de près et dans son ensemble, elle prend des proportions
  considérables, et devient un grand événement, le seul qui
  troubla la paix du XVIIe siècle. La révolte des Cévennes fut
  concentrée entre quelques rochers; la querelle du Quiétisme ne
  fut qu'une intrigue de cour que l'exil de Fénelon termina ; la
  révocation de Fédit de Nantes n'émut que les Protestants, une
  petite partie de la France, ; et encore y eût-il des plaintes, mais
  pas de résistance. Mais les Jansénistes formaient à la fois une
  secte, une école et un parti, étaient revêtus de la triple autorité
  de la science, du génie et de la vertu, et remuèrent l'opinion
  dans tous les sens. La cour et la ville, le clergé et le Parlement
  s'émurent de leur querelle, les plus grandes illustrations du temps
  y prirent part ou s'y intéressèrent, la puissance temporelle in-
  tervint, les évêques se divisèrent, le pape fut obligé de pro-
  noncer. Et la puissance de ce roi qui avait chassé les protes-
  tants, assujéti le Parlement, absorbé la noblesse, et au dehors
  vaincu l'Espagne, humilié la Hollande et dominé l'Europe, vint
  échouer contre de pauvres théologiens. Leur pensée battue et
  persécutée n'en subsista pas moins, lui survécut même, et jus-
  que dans le siècle suivant, au milieu des discussions philo-
  sophiques et de leurs orages, avant-coureurs de ia Révolution
 française, eut encore le pouvoir de troubler les esprits.
y De tout cela, il est une conclusion à tirer, c'est que l'au-
  torité la plus absolue, la mieux soutenue par les mœurs, entre
  les mains les plus respectées, ne peut lutter contre une pensée,
 je ne dis pas juste, mais seulement qui paraît l'être. C'est que
  la toute-puissance ne peut se passer du concours de l'opinion,
 je ne dis pas dans l'ensemble de sa conduite, mais dans un seul
  acte important. C'est qu'elle n'anéantitpas l'opinion, parce qu'elle
 n'anéantit pas la société, mais souvent consolide au contraire
 cette opinion, en la contraignant d'unir ses forces que la liberté
 diviserait et de modérer son action. C'est que l'opinion est tou-
 jours forte chez un peuple qui a des mœurs et des lumières,
 parce que là elle est unie", elle est énergique, elle est active, elle