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CHRONIQUE THÉÂTRALE. 175 brale, due à un enthousiasme sans limite, on est tenu à mon- trer envers des violonistes de l'ordre de M. Bazzini, un empres- sement au moins égal. Il est, comme on l'a dit, un des trois ou quatre héritiers de Paganini ; nul ne fait mieux chanter son ins- trument, et, quant aux difficultés les plus scabreuses, on peut dire qu'il s'en joue avec une sûreté sans exemple. Nous citerons sa Ronde des Lutins comme une des choses les plus éton- nantes qui aient jamais été jouées. C'est fantastique comme une ballade allemande, ciselé et fini de détails comme une poésie de Goethe. Ce mois-ci a encore été signalé par la reprise du Comte Ory. Quelle musique éternellement jeune, et comme à côté d'elle tout semble pâle et sans vie ! Quelle ironie et en même temps quelle grâce ! M. Anthiome, qui remplissait le rôle du comte, a chanté et. joué comme on chantait et jouait autrefois, au temps où toutes voix., même les plus faibles , ne visaient point aux grands effets de sonorité, au temps où Nourrit donnait le pas à la scène fran- çaise. Jamais M. Anthiome n'avait montré plus de goût et fait un meilleur usage de sa voix de tête. Au Comte Ory a succédé Si j'étais Roi 1 opéra comique en trois actes, de M. Adolphe Adam. Si M. Adam n'est pas le premier compositeur de notre temps, il est sans contredit celui qui écrit avec le plus de rapidité. Il s'est constitué depuis quelque temps le pourvoyeur assidu du théâtre lyrique, sans que pour cela il oublie l'opéra-comique. Malgré toute la facilité qui distingue ce compositeur, il est impossible d'avoir toujours l'inspiration à son service. On est alors forcé de faire d'un opéra une corbeille de rognures tirées d'autres ouvrages. C'est ce qui arrive à M. Adolphe Adam ; cependant il y a trop en lui d'abondance mélo-