page suivante »
DISCOURS DE M. E1CHH0FF. 131 uu mélange de dignité et de grâce, de douceur et de force qui élève les guerriers et ennoblit les héroïnes, et qui, loin d'exclure la variété, cache tantôt la simplicité des formes sous un coloris plein.d'attrails, et les fait tantôt ressortir avec une énergie irrésistible. Renaud et Tancrède ! quelle ressemblance et quel contraste entre ces deux guerriers défenseurs d'une .même foi, mais entraînés par des passions diverses ; l'un vif, impétueux et bouillant comme Achille, invincible au combat, trop sensible aux plaisirs, mais sachant briser leurs en,traves ; l'autre, plus réfléchi , généreux , magnanime , victime d'une seule fai- blesse , mais prodigue de sa vie qu'il dévoue , comme Hector, à la défense des siens. Soliman et Argant, nouvelle oppo- sition entre le vrai courage intrépide , résigné , et la fureur sauvage, jalouse, impitoyable. Raymond et Aladin , contraste •de vieillards inspirés par une foi contraire. Sophronie, Her- minie , vierges pures et radieuses; Clorinde , l'invincible Amazone, plus vaillante que Camille et plus touchante encore ; Armide , la brillante enchanteresse , succombant comme Didon à l'amour qu'elle excite ; et, au milieu de tous ces caractères, l'héroïque Godefroi qui les domine tous par l'austère pureté de son âme et la sainte ardeur de sa- foi ; telle est le majestueux ensemble des personnages créés par le génie du Tasse. L'Ariosle s'était exercé dans la comédie et la satire, le Trissin inaugura la tragédie , pendant que le Tasse et Guarini enno- blissaient le drame pastoral, et que l'enthousiasme lyrique ins- pirait heureusement Chiabrera. La prose italienne avait acquis une énergie irrésistible dans les pages brûlantes de Machiavel; et le sage Guichardin l'avait pliée à la sévérité de l'histoire, pendant que, sous la plume de Galilée, elle proclamait les merveilles de la .science. Rien rie manquait a la gloire du XVIe siècle,Mont tous les trophées littéraires s'embellissaient encore