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                            PÉLOPONÈSE.                           489

  lité s'est perpétuée dans ce pays ; aujourd'hui, comme autrefois,
  les hôtes y sont sacrés.
     Deux hommes étaient restés dans le khan ; le plus jeune sem-
  blait avoir vingt-cinq ans ; l'autre était un vieillard à cheveux
  blancs. Ils portaient tous deux un costume guerrier ; leurs vê-
  tements étaient salis et en désordre ; ils avaient quitté leurs
  ceintures garnies de poignards et de pistolets, ainsi que leurs
  longs fusils à la crosse de cuivre ciselé, au canon richement da-
 masquiné ; leur sabre courbé pendait seul à leur épaule, retenu
 par un mince cordon de soie. Le jeune homme examinait les
 armes l'une après l'autre, frottant les crosses pour les faire
 luire, et nettoyant les détentes ; il les remettait ensuite au vieil-
 lard, qui les tournait et les retournait en tous sens pour s'assu-
 rer qu'elles se trouvaient en bon état. Ils étaient si absorbés par
 cette occupation , qu'ils n'avaient même pas levé les yeux pour
 voir qui était venu s'asseoir si près d'eux au même foyer. Pen-
 dant que je les considérais attentivement, mon guide vint me
 frapper sur l'épaule et me dit, en me les montrant du doigt:
 « xkîçrxis (ce sont des Clephtes). » Et il attendit, en me regar-
 dant avec un sourire, l'impression que ces mots produiraient en
 moi. Je crus devoir lui cacher que j'aurais autant aimé rencontrer
 sur mon chemin des personnages moins intéressants, mais en
même temps moins équivoques, et je lui répétai d'un air pure-
ment curieux : «nkèÇTacs? — Oui, des Clephtes, me dit-il, mais
ne craignez rien ; ces deux hommes sont aussi respectés que le
roi dans tout le Péloponèse ; ces Clephtes-là n'ont rien à démê-
ler avec les soldats du gouvernement. Quand ils seront partis,
je vous conterai leur histoire. »
   Poussé par l'intérêt qu'excitait en moi ce préambule, je me
 rapprochai insensiblement de ces deux hommes pour les exami-
 ner de plus près. Le vieillard, homme haut et sec, malgré ses
cheveux blancs, indice d'un âge avancé, ne portait sur sa phy-
sionomie aucune trace de vieillesse ; c'était une de ces natures
inaltérables au temps, comme le rocher qui conserve ses mous-
ses, ses couleurs et sa force jusqu'au jour où une tempête inat-
tendue le déracine et le pulvérise dans sa chute. Ses longues