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             SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE.                295
 mer le goût et l'opinion du public, se plaisent-ils depuis quel-
 que temps à vanter outre mesure l'imitation servile de la nature,
 et à décrier quelques peintres qui, ayant traité des sujets fa-
 miliers et historiques, sont accusés d'avoir traité un genre faux,
 basé sur des principes nuageux, et de ne pas s'être assez préoc-
 cupés des procédés matériels de l'art. Hélas ! ils ne s'en étaient
 que trop occupés, puisque les peintres qui leur ont succédé ont
 attribué le succès de leurs œuvres uniquement au charme de la
 couleur et de l'exécution, et, dédaignant la noblesse des formes
 et le choix des sujets intéressants, pour s'appliquer à une ser-
 vile imitation de la nature, ils choisissent leurs sujets dans les
 scènes les plus triviales, persuadés que la nature doit partout
 être belle ; sans doute, on peut la rendre belle, mais en l'enno-
 blissant par L'idéal de la poésie qui peut tout embellir.
    Que nos peintres de genre imitent les Hollandais par les pro-
 cédés de la couleur, mais qu'ils ajoutent à leurs scènes fami-
lières l'intérêt d'une situation touchante ou d'une pensée spiri-
tuelle, et, dans le paysage, en copiant la nature dans toute sa
sévérité, au lieu de peindre des chaumières ignobles et des pla-
ges monotones, qu'ils étudient les beaux sites et les belles
fabriques, tels que les ont choisis le Titien, le Poussin et l'in-
comparable Claude Lorrain. On prétend aujourd'hui que le pay-
sage historique a amené la décadence de la peinture ! Mais si
les paysagistes de la dernière école n'étaient pas coloristes, il
n'en faut pas conclure que la recherche du haut style doit ex-
clure la vérité? on peut être vrai, dans toute l'acception du mot,
en composant le paysage dans le style du Titien et du Lorrain,
tout aussi bien que dans celui de Berghem ou de Ruysdaël.
   Le style poétique n'exclut jamais la vérité.
                                         FLEURY RICHARD.