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518 LA COUSINE BR1DGET. ceau de sucre trop gros pour ses forces. Le plancher est couvert de pots de conserve, de bocaux de fruits au vinaigre, parmi lesquels sont des paillassons et un vase de bois plein de cran- berries (1). Dans un coin obscur, sa cage d'osier, suspendue au milieu des morceaux de lard, etc., on voit un sansonnet. 11 n'a qu'une plume éraillée à la queue; il lui manque un œil, et une de ses pattes est estropiée ; mais on le chérit, car on le possède depuis des années. Nuit et jour, il est dans son coin ; paraissant faire tous ses efforts pour découvrir quelles choses étranges sont appendues autour de sa cage. Ilfixesur elles son petit œil perçant, et, quand on les déplace, il prononce une quantité de mots d'un ton interrogatif, comme pour demander chaque fois si c'est ainsi qu'on les nomme. Mais, comme personne n'a jamais pris la peine de l'en informer, il est encore à les contempler, sans avoir pu résoudre le problême. Chose étrange ! il n'est personne dans la maison qu'il aime autant que la pauvre sotte de Janey. Il a des coups de bec pour quiconque essaie de l'approcher ; mais , quand il voit Janey, il s'écrie toujours, dans une véritable extase : — Jack est bien sage. Lorsque Minna entra, Jane était dans la boutique, la physio- nomie plus triste, plus hébétée que jamais. Minna en fit de suite la remarque ; mais elle avait trop d'adresse pour en rien laisser paraître. — Eh bien ! Janey, dit-elle de cette voix claire qui se faisait entendre du cœur affligé et le ranimait, votre mère y est-elle, ou bien Peggy? Je dis cela, parce que, s'il y a quelqu'un pour garder la boutique, je vous montrerai à arranger le bonnet, j'ai apporté le ruban. — Oui, ma mère y est. Mais je vous le dis, Minna Westrop , Peggy est encore sortie ! Et, en prononçant ces derniers mots, presque à voix basse, elle fixait attentivement Minna. — Et qu'importe, ma chère Janey ? Le temps est beau pour (t) Sorte de confitures faites avec des canneberges, fruit inconnu en France,