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482                       KLEURY ÉPINAT.
 rent au milieu de ceux qu'ils avaient quittés. Épinat, privé de
 la société de ses compatriotes, isolé désormais, inquiet peut-être
 de voir les préparatifs de guerre qui se faisaient en Italie, se dé-
 cida aussi à quitter cette terre de sa prédilection, et à rentrer
 dans son pays natal. On était au commencement de 1800 ; depuis
 quinze ans il était hors de France ; il avait trente cinq ans ; il
 se rendit à Montbrison, fit une visite à sa famille, et revint se
 fixer à Lyon, où son talent et son heureux caractère surent, ainsi
 qu'en Italie, lui procurer des amis.
    Cette époque ne fut pas la plus heureuse de sa vie. La tran-
 quillité intérieure était rétablie, mais le pays avait trop de bles-
sures à panser, pour s'occuper beaucoup de beaux arts. Les
 grands tableaux d'histoire ne se vendaient pas. Les fortunes
 ébranlées, se rétablissaient avec peine. Quelques personnes, re-
 venues de l'émigration, comprenaient le besoin de compléter
leur éducation, quelques enfants consentaient à prendre des le-
çons de peinture ou de dessin. Épinat renonça courageusement
à faire de la grande peinture, il peignit des décors pour les fêtes
de la République, il fit des paysages à la portée de ceux qui les
payaient, trop souvent même il ne donna du temps et du talent
qu'en proportion de la somme qu'il espérait obtenir, et, ce quj
allait peut-être plus mal encore à sa verve et à la fougue de
son imagination, il se mit à professer son art.
    Un jour il se réveilla pourtant avec une idée qui dût lui rap-
peler les plus beaux moments de sa jeunesse. Les Façades qu;
ornent les deux extrémités de la place de Bellecour étaient ter-
minées, et le gouvernement voulait faire sculpter sur les attiques
deux traits de l'histoire de Lyon. Épinat était choisi pour en faire
les dessins, que Chinard devait exécuter. Quelle joie pour l'ar-
tiste qui laisse languir ses facultés, de voir enfin une occasion
de les déployer tout entières ! Son travail ne sera point enfoui
dans l'obscurité d'un cabinet ; une ville pourra le contempler à
chaque instant du jour, et les étrangers en garderont le souvenir.
Il faudra prendre deux faits illustres,deux actions grandioses dignes
du monument, et dignes de la seconde ville de France. Épinat eut
le bonheur de trouver une pensée, et il eut le talent de l'exécuter.