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LA. VIERGE D'AINAY. 437 poitrine. Ce que nous demandons dans Manie conçue saûs péché, ce n'est ni l'attitude d'une mère qui appelle ses enfants, ni l'extase d'un Magnificat, ni .même l'expression de la reconnaissance : c'est l'idéal de cette nature humaine sur laquelle la lésion morale ne s'est pas fait sentir. Il faut que la transparence des sens laisse apercevoir la beauté d'une âme qui régne sans opposition et sans contrainte. Nous croyons que ces qualités se trouvent éminem- ment dans l'œuvre de M. Bonnassieux. Sa Vierge est d'une ravis- sante beauté, mais de cette beauté noble que donne la vertu. Son front est d'une sérénité parfaite : c'est comme un lac sur lequel un souffle n'a pas passé. Quand on la considère attentivement, il semble qu'on devine sa pensée, et cette pensée paraît si belle et si pure que le cœur s'y laisse entraîner. L'attitude générale est pleine de modestie et d'abandon ; les bras posés l'un sur l'autre, sans affectation, retiennent aussi sans effort les plis de la drape- rie. La vierge est légèrement appuyée sur la jambe droite ; cela tient au mouvement qu'elle fait pour rejetter, avec le pied gauche, la tête du serpent qu'elle vient d'écraser. Comme cette idée est bien du sujet ! c'est peu d'avoir vaincu le mal, il faut en rejeter la pensée loin de soi. Que dirais-je de l'exécution? Ce que tout le monde sait : que le marbre, entre les mains de M. Bonnassieux , est comme une cire molle et obéissante. Ses draperies sont d'une simplicité et d'une légèreté exquises. Leur arrangement a quelque chose de la symétrie du type bysantin, ce qui n'est pas le moins du monde un défaut. Lefiletd'or qui borde la draperie et le liseré bleu du voile sont d'un très-bon goût. Peut être y a-t-il un peu de sécheresse dans les contours du visage, toutefois, elle n'est qu'apparente : cela tient à la crudité du marbre, crudité que le temps fera disparaître, mais aussi, et plus encore, à la manière dont la statue est éclairée. Le jour qu'elle reçoit ne pouvait être plus mauvais ; il est évident que la lumière doit tomber de haut et de face. Le seul parti à prendre est, ce nous semble, de faire un ciel ouvert, et de placer dans les fenêtres de la chapelle des vitraux légèrement sombres ; alors l'harmonie sera complètement rétablie et la statue y gagnera. La vierge est posée sous un archi- volte bysantin dont l'ornementation fait honrieur au crayon de