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ADOLPHE ADAM A LYON EN 1851. 327 luxe, et qui, pour être exercée, nécessite du goût et de l'élé- gance. Lyon possède un musée et une école de peinture, dirigée par un artiste éminent, M. Bonnefond. Une de nos sommités, M. Saint-Jean, le célèbre peintre de fleurs, n'a jamais cessé d'ha- biter Lyon. Un cours de littérature, fait par M. Victor de La- prade, un de nos poètes distingués, attire un grand concours d'auditeurs ; il manque, comme complément, un cours d'études musicales, et une succursale du Conservatoire pourrait y être d'autant plus facilement établie, que ce serait le point de jonc- tion entre nos départements du midi et ceux du centre de la France, où les voix sont plus rares. En me rendant à Lyon, j'avais l'intention de monter Giralda et de faire exécuter la Messe que j'ai composée pour l'association des musiciens. Tout semblait devoir faire échouer mes projets. Le baryton du Grand-Théâtre était tombé malade et avait un congé. Il fallut que j'en amenasse un de Paris, ce fut M. Laurent, qu'on a vu débuter avec succès à l'Opéra. Mais M. Laurent ne savait pas un mot du rôle, et il dut l'apprendre de la première à la dernière note. Ensuite, les usages diocésains de Lyon n'ad- mettent pas la musique à orchestre dans les églises. Il fallut transformer la solennité religieuse en un concert spirituel, donné au théâtre. Ici, il se manifesta une singulière opposition : ceux qui regardaient comme trop mondain d'exécuter de la musique à l'église, prétendirent que cette même musique ne pouvait, sans scandale, être transportée au théâtre. Il y eut même un commen- cement d'opposition et une protestation signée, envoyée à deux grands journaux de Lyon. Ceux-ci répondirent avec justesse que ce que l'on traitait d'innovation scandaleuse n'était, au con^ traire, que le renouvellement d'un ancien usage consacré sous la Monarchie, suspendu pendant la Révolution, depuis 93, rétabli sous l'Empire et la Monarchie, et aboli seulement par la Révolu- tion de 1830. Quoi qu'il en fût de toutes ces protestations isolées, le public ne se porta pas moins au théâtre le jour de l'exécution. Elle fut admirable, grâce au concours désintéressé des amateurs qui vinrent renforcer le bel orchestre dirigé par George Hainl, et au