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DU BUGEY. 29 est une autre qui se présente à l'esprit avec une gravité non moins grande contre le système de l'abbé Jolibois, à savoir l'affluence probable des négociants grecs à Lyon , après la fondation de Plancus. La Gaule étant ouverte au commerce grec parla conquête des Romains, il est plus raisonnnable de supposer que, si des comptoirs grecs ont été créés dans l'in- térieur , leur établissement date plutôt du commencement de la période romaine que du temps des Celtes. L'activité commerciale accrue par la présence des Romains, la richesse territoriale versant de nombreux produits par l'impulsion civilisatrice de ces maîtres du monde qui, pour le gouver- ner, laissaient le négoce aux autres peuples, donnent à cette interprétation une plus évidente démonstration. Le vigou- reux critique de l'abbé Jolibois a-t-il affaibli le témoignage de Pline sur la dénomination du Rhône, attribuée aux Rho- diens ? Est-il étonnant qu'un grand fleuve , qui baigne, à son embouchure, une florissante colonie grecque, ait reçu son nom d'un peuple de la Grèce ? Du temps de Pline, les traditions celtiques n'étaient pas effacées, et son autorité est d'autant plus grande, qu'il était plus rapproché de cette origine et que, par ses liaisons dans la Gaule et notamment à Lyon , il était à même d'en parler exactement. Le savant saint Jérôme s'est fait aussi l'organe de cette tradition gau- loise , et, en présence de l'assertion de ces grands esprits, des étymologies empruntées à la langue celtique, en grande partie perdue et presque complètement ignorée, peuvent- elles prévaloir ? Il est vrai que les témoignages et les argu- ments, à l'aide desquels M. de Belloguet produit ses racines celtiques, concernant le Rhône et la Saône, ne sout pas dépourvns de consistance et qu'ils sont goûtés par de bons esprits, en dehors de toute opinion systématique. Sur ce point, comme sur tant d'autres, les nuages qui couvrent l'antiquité ne sont pas toul-à -fait dissipés.