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                     M. A.-C.-H. TRIMOLET.                     113
n'éprouve pas d'altération notable. Quant au prix de 10,000 fr.
le prince n'a fait aucune réflexion, et Monseigneur vous donne
tout le temps qui vous sera nécessaire pour bien achever l'ou-
vrage que vous entreprenez pour lui, et qui, je n'en doute pas
d'avance, contribuera à rendre votre nom célèbre, et donnera
désormais plus de poids à ma recommandation, etc. »
   La commande était en règle : il fallait me mettre à l'ouvrage.
   Le sujet que l'on me donnait à traiter n'était pas précisément
dans mes goûts ni dans le genre qui jusque là m'avait occupé
6t fait connaître. Ce n'était plus la nature que j'avais sous les
yeux qu'il me fallait représenter, mais un trait historique du
XIV« siècle.
   Je tenais à être exact, et les divers auteurs que je consultais
sur l'histoire de Savoie me présentaient Amédée VIII sous un
jour différent ; le caractère et le costume des chevaliers Hermi-
tes de Ripaille variaient selon chaque écrivain ; je m'en tins à
la version de Guichenon, laquelle me parut la plus convenable.
   Malgré mes recherches, je ne pus trouver aucun portrait au-
thentique des personnages que j'avais à mettre en scène.
   Ensuite, pour l'exécution du tableau vinrent les difficultés de
toute espèce, au nombre desquelles je mettrai presque en pre-
mière ligne celle de me procurer la nature de chaque chose, mo-
dèles vivants, costumes, accessoires, etc. Car je n'ai jamais rien
pu faire qui me satisfasse un peu, sans la présence de la nature.
   Dans ce moment, j'étais, pour ainsi dire, le seul peintre à
Lyon. Les autres avaient émigré de cette ville anti-artistique
pour aller se retremper au soleil d'Italie, et se purifier du péché
d'être eux !
   Quand mon état de santé me permettait de sortir (car j'étais
malade, et beaucoup, quoiqu'on ne voulût pas le croire), je re-
gardais la tête de tous les passants, pour trouver des modèles,
et je gémissais de la pauvre physionomie de nos bons citoyens !
point de barbes à cette époque, et il m'en fallait au moins six !
Quelques-unes bien blondes, bien brunes, bien peignées et ci-
rées, se trouvaient seulement au menton des jeunes sapeurs de
nos régiments.
                                                       •S