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HO BU SENTIMENT POÉTIQUE DE LA NATURE. médiatement sensible des objets, forcé qu'il sera par les lois de notre esprit à juger de toutes les formes d'après leurs rapports avec nos propres idées, nos propres impressions, celui-là sera or- dinairement plus porté à chercher dans la nature l'expression des choses de l'âme,il saisira surtout les rapports de la nature avec l'humanité. Enfin, l'aspect de cette puissance de vie qu'atteste la nature et qui semble avoir une existence indépendante, et prendre sa source en elle-même, tant elle s'élève en dominatrice au-dessus de l'homme, l'aspect de la vie dans le monde physique frappera tel- lement certaines intelligences, que l'âme s'oubliera elle-même en face de l'univers, comme elle oubliera aussi le monde invisible et absolu dont la nature n'est que l'expression et le produit. Il se rencontre, en effet, quoique le nombre en soit bien rare parmi les poètes de l'Occident, des esprits qui perdent de vue et l'idée d'un monde invisible et le sentiment de l'humanité, au sein de la contemplation absorbante de la vie dans la nature. Chacune de ces trois branches principales du sentiment esthé- tique de la nature pourrait se subdiviser en une multitude de ramifications dont nous verrions dériver tous les différents genres de composition poétique et de style, et plusieurs même des gran- des divisions de l'art ; mais nous ne faisons pas ici une théorie générale et complète du sentiment poétique de la nature ; le but de notre travail est de faire l'histoire de ce sentiment à l'époque hellénique, nous n'avons donné à la partie théorique que le dé- veloppement strictement nécessaire pour faire comprendre à quels principes se rattachent nos jugements sur la poésie grecque. Victor DE LAPRADE.