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88                        VOYAGE EN ICAK1E,

puisse bien y trouver des sujets à satisfaire les plus difficiles.
   Quoi qu'il en soit, du reste , de cette double perfectibilité
indéfinie et du progrès nouveau que le bon Icar réserve à l'es-
pèce humaine, voici ce que je propose :
   Qn sait que M. Cabet quitte la France ; ingrate patrie, tu
n'auras pas ses os ! Il médite une grande émigration à'ica-
riens. Ils partent en Automne avec les hirondelles pour ne
pas revenir avec elles au printemps. Quand leur République
aura fonctionné assez longtemps, nous entrerons en négocia-
tions avec 1'/carte (entre Républiques on s'entend aisément )
à l'effet d'obtenir de M. Cabet cent de ses plus beaux produits,
tant mâles que femelles ; nous les ferons élever avec soin au
Jardin-des-Plantes, et nous posséderons enfin cette belle race
pourla multiplier, sauf peut-être à la voir dégénérer bientôt
sur le sol ingrat de la France.
   J'ai encore à parler de tant de choses que je me vois, à re-
gret, forcé de passer sous silence 1''agriculture. Je renvoie le
lecteur à la ferme-modèle de M. Mirol, qui enseigne comme
les Géorgiques, sous quel signe il faut labourer la terre,
tailler la vigne, etc. (1).
    Dans l'établissement icarien, la religion tient peu de place.
M. Cabet a bien voulu toutefois adopter ces grands principes
de morale qu'il n'a pas inventés : « — Aime ton prochain
comme toi-même. — Ne fais pas à autrui le mal que lu ne
 voudrais pas qu'il te fil. — Fais à autrui tout le bien que tu
 désires pour toi-même. » Il pousse la condescendance jusqu'à


   (1) Je demande pardon à M. Cabet de ce souvenir classique qui risque
de lui déplaire, car il défend sévèrement, dans ses domaines, l'usage du latin
el du tabac. Passe pour le latin, mais le tabac ! c'est d'une mauvaise politi-
que : le Communiste est culolleur de pipe : Il faudra qu'il opte entre la com-
munauté et la pipe. C'est le mettre à une rude épreuve qu'on eut pu lui
épargner.