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LA TENTATION. 293 Mais observant de loin que Jésus se prosterne, Déjà l'esprit d'orgueil goûte un triomphe, interne, En son aveuglement Satan s'est écrié : « S'il était plus qu'un homme il n'aurait pas prié ! » Et, préparant son dard, l'infernale couleuvre Dont le venin jadis du maître a souillé l'œuvre, Voyant ce corps maigri par le jeûne et défait, Des besoins de la chair tente d'abord l'effet ; Car le premier conseil du prince de l'abîme Prend avec art la voix d'un besoin légitime. « Es-tu le fils de Dieu, commande, et dans tes mains Ces pierres, lui dit-il, vont devenir des pains. » Et Jésus répliqua « L'homme, a dit le saint livre, Ne vit pas seulement de pain, mais il doit vivre De tout Verbe qui sort de la bouche de Dieu. » Alors Satan le prend et le porte au milieu De la sainte cité, sur le faîte du temple, Et citant l'Écriture à son tour en exemple : « Es-tu le fils de Dieu, ce Christ que l'on attend, Tu peux nous le prouver en te précipitant ; Car il est dit que Dieu, qui d'en haut te regarde, Aux anges a prescrit de t'avoir sous leur garde, Et qu'ils empêcheront te portant dans leurs mains Que ton pied ne se heurte aux pierres des chemins. » Satan voulait sonder, en sa vieille imposture, L'à me du solitaire et sa double nature.