Revue du Lyonnais » série 1 - n°27 ( 1848 ) » pp.184

184             DE I/DSAGE DES EAUX THERMALES
 rompue et si corruptrice des empereurs, on pourra aisément se
 faire une juste idée de la-vie qu'on menait dans ces lieux de réu-
 nion, où se rassemblaient les riches, les oisifs, les hommes vo-
 luptueux de la capitale de l'univers, et l'on n'hésitera pas à leur
 appliquer le jugement deSénèque, qui ne paraît pas trop sévère
lorsqu'il appelle la ville voluptueuse de la Campanie un rendez-
vous de tous les vices: Diversorium vitiorum. Des mémoires
 du temps sur les thermes de l'Italie les plus fréquentés du
beau monde de Rome eussent été bien curieux, et nous au-
raient conservé bien des anecdotes scandaleuses, tragiques ou
 ridicules.
    Ailleurs qu'à Baies, ils eussent pu dire, sans doute, avec le
philosophe que je viens de citer : Jllic sibi plurimum luxuria
permittit ; illic, tanquam licentia debeatur loco, magis sol-
vitur.... Videre ebrios per littora errantes, et commissationes
navigantium, et symphoniarum cantibus perstrepentes lacus
et alla, quœ velut soluta legibus luxuria non tanturn peccat,
sed publicat. Ailleurs peut-être qu'à Sinuessa, ils nous auraient
montré quelque gastronome peu soigneux du régime, arrosant
sa chair délicate d'une boisson plus enivrante que les eaux, puis
rentrant attardé et chancelant, pour subir dans toute sa rigueur
le sort auquel échappa le Philostrate de Martial :
         A Sinuessanis conviva Philostratus undis
              Conductum repetens, nocte jubente, larem,
         Paine imitatus obit sœvis Elpenora fatis ,
              Pvœceps per longos dum ruit usque gradus,
         Non esset, Nymphae, tam magna pericula passus,
              Si potius vestras ille bibisset aquas.

   Enfin, plus d'une fois aussi, ils nous auraient fait voir la fidélité
d'une épouse, l'union d'un ménage, l'avenir d'une famille heu-
reuse détruits par une liaison coupable, que facilitait la licence
de ces lieux ; car, à coup sûr, on ne peut regarder, comme chose
bien rare, l'aventure racontée dans cette petite pièce d'un poète
trop souvent licencieux, mais toujours observateur et quelquefois
moral, que j'ai déjà cité bien souvent.-